Sanctions AMF : une subvention publique comptabilisée trop tôt peut coûter cher !
Thursday 04 March 2010 ReginfoEntrée en application le 1er novembre 2007, la directive sur les
Marchés d'instruments financiers (MIF) doit être révisée cette
année. Ainsi en a décidé Bruxelles. Dès lors, pour préparer la
position de la France, Christine Lagarde a confié au président de
Crédit Suisse, Pierre Fleuriot, le soin de rédiger un rapport sur la directive, qu'il a remis le 17
février 2010.
Rappelons que la MIF fait partie du Plan d'action pour les services
financiers (PASF) lancé par Bruxelles en 1999 et qui avait pour
objectif du construire un marché financier européen unifié. Dans ce
cadre, la MIF, destinée à remplacer la Directive sur les services
d'investissement de 1993, apportait trois innovations majeures
:
- la fin de la règle de concentration des ordres et donc du
monopole de fait des entreprises de marché,
- une transparence renforcée pré et post marché, autrement dit
avant et après l'exécution des ordres,
- de nouvelles obligations pour les PSI en matière d'exécution
leur imposant d'offrir à leurs clients la meilleure exécution
possible (règle dite de la Best execution) dans un contexte
désormais ouvert à la concurrence en matière de négociation de
titres.
A l'heure du bilan, le constat est sévère. Il ne surprendra pas
ceux qui assistaient en décembre dernier aux Entretiens de l'AMF.
Une table ronde consacrée à la MIF avait été en effet l'occasion
pour les intervenants de tirer à boulets rouges sur le texte.
Nous vous en avions parlé ici.
La concurrence nouvelle en matière de négociation instaurée par la
directive devait entraîner une baisse des tarifs ? Elle existe et
a même été évaluée à --33% par une étude commandée par la
commission européenne. D'ailleurs, Euronext confie avoir diminué
ses prix de 40% en 2009. Le problème, c'est qu'elle n'est pas
ressentie par l'investisseur final. On la dit absorbée par
les investissements liés à la mise en place du nouveau système
(connexion aux multiples plateformes, collecte de l'information,
etc.). C'est un premier échec, au moins temporaire.
La
transparence ? Elle n'est pas au rendez-vous dans
le post-trade. D'ailleurs, les émetteurs se plaignent de n'avoir
plus de visibilité sur leurs titres. La multiplication des lieux de
négociation, le développement de l'internalisation (création par
les banques de leur propre marché en interne) et des darks pools
(marchés de gré à gré) a multiplié les sources d'information et
accru d'autant l'opacité des transactions.
Ce diagnostique étant posé, le rapport Fleuriot avance plusieurs
propositions destinées à améliorer la directive. Celles-ci tournent
autour de 3 idées-forces : renforcer la qualité de l'information
disponible, rendre la réglementation adaptable pour qu'elle suive
les évolutions des marchés et renforcer enfin la régulation
européenne. En pratique, cela mène à 4 pistes de réformes
importantes.
Première proposition : assurer
la transparence en créant une base de données
consolidée. En l'état, les plates-formes publient
leurs informations post-trade selon leurs propres standards. Les
données comportent de nombreuses erreurs et notamment des doubles
comptages. Par ailleurs, cette disparité entre les systèmes rend
l'agrégation des informations complexe et surtout coûteuse. Le
rapport souligne que la collecte d'informations est plus chère et
de moins bonne qualité en Europe qu'aux Etats-Unis. Conclusion : il
faut s'inspirer du modèle américain et mettre en place une base de
données consolidée à l'échelon européen qui recensera toutes les
transactions effectuées. Comme le souligne l'auteur du
rapport : « Le principe de transparence ne suffit pas : la
transparence doit s'organiser ». La MIF avait posé le principe, sa
révision sera donc l'occasion d'en poser les règles
d'application.
Deuxième
réforme: supprimer les distorsions de concurrence
entre les marchés réglementés et les nouvelles plates-formes qui,
pour l'heure, obéissent à des règles différentes et, en
particulier, fixer une taille minimum pour les transactions
réalisées via les dark pools afin d'éviter le développement de
marchés parallèles échappant aux règles de transparence.
Troisième réforme : clarifier
le principe de « Best execution ». Pour
l'heure, ce principe exige que le prestataire qui exécute l'ordre
le fasse dans les meilleures conditions possibles au regard de
plusieurs critères : coût, rapidité, probabilité de l'exécution et
du règlement, taille de l'ordre etc. Or, le rapport relève qu'aux
Etats-Unis, la best execution consiste simplement à exécuter un
ordre au meilleur prix, ce qui s'avère plus efficace. Un
système qui n'est pas transposable en Europe actuellement
faute de disposer d'un système harmonisé de compensation et
de règlement-livraison. Pierre Fleuriot juge souhaitable en
conséquence de fixer des standards précis et harmonisés sur les
différents paramètres relevant de la best execution.
Quatrième réforme enfin :
accélérer l'harmonisation du post-trade, ce qui
passe à terme par la création d'une chambre de compensation unique
en Europe.
A observer les failles de la directive révélées par le rapport et
largement évoquées par les différents acteurs de la Place, on
pourrait penser que celle-ci est un échec. En réalité, même les
plus critiques n'entendent pas revenir en arrière et soulignent que
l'ouverture de la négociation à la concurrence est une bonne chose.
D'ailleurs, elle s'est faite avec succès, vu le nombre de nouvelles
plates-formes qui ont été créées depuis 2007. Simplement, il s'agit
de corriger les défauts apparus lors des deux premières années
d'application. Le rapport Fleuriot a le mérite d'ouvrir les
réflexions.
Andréa Bonhoure
Brève : L'AMF a publié le 8 février une recommandation relative à la présentation des éléments d'évaluation et des risques du patrimoine immobilier des sociétés cotées.
Brève: Une autre recommandation, publiée le 5 février concerne les communiqués relatifs aux comptes annuels. A la suite d'une étude menée auprès de 169 sociétés des compartiments A, B et C, le régulateur estime nécessaire de rappeler certaines recommandations insuffisamment respectées, de promouvoir les bonnes pratiques et de mettre à jour la recommandation COB 87-02.