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LES ECHOS : « Si la BCE doit faire plus sur les achats d'obligations, elle le fera »

jeudi 19 mars 2020 Les Echos Visiter le site source

Quelle est votre première analyse de cette crise sanitaire et économique ?

C'est un choc que personne n'avait anticipé, c'est un choc sévère dont l'ampleur et la durée sont encore incertains, mais ce devrait être un choc temporaire. Et c'est un choc qui part cette fois de la sphère réelle : une épidémie qui a des effets économiques qui ont eux-mêmes des conséquences financières. Nous ne sommes donc pas dans la situation de 2008, quand la crise financière était le point de départ ; aujourd'hui, c'est le bout de la chaîne. 

Dans ces conditions, les pouvoirs publics ne doivent avoir - hormis bien sûr la priorité de santé publique - qu'un objectif : tout, absolument tout faire pour que le choc économique reste temporaire. Les gouvernements et les banques centrales doivent mettre en place, et c'est ce qu'ils font depuis jeudi dernier, un bouclier total pour les entreprises et les ménages, pour qu'ils tiennent pendant cette phase d'arrêt de l'économie. Un exemple : si un avion reste cloué au sol, c'est une perte économique temporaire, mais si la compagnie fait faillite, c'est une destruction de capacité productive et une perte durable de croissance. Même chose pour les restaurants, les PME et toute l'économie. 

Élaborez-vous, à la Banque de France et à la BCE, des scénarios ? 

Nous suivons en temps réel la situation des entreprises et des secteurs, mais aucun chiffre ne peut être vraiment donné à ce stade sur 2020 ; la Banque de France reporte d'ailleurs ses prévisions annuelles normalement attendues le 23 mars. Tout dépendra de la durée de la bataille contre l'épidémie. Mais soyons clairs : s'il y a un arbitrage à faire entre cette bataille et les risques économiques, la priorité, c'est évidemment la victoire contre l'épidémie. Nous sommes, relativement, davantage confiants sur 2021 et 2022. La BCE y maintient à ce stade une prévision d'environ 1,3 % pour la zone euro. Si le bouclier est efficace, nos pays sortiront de l'épidémie sans « casse » significative des capacités de production. 

L'action de la BCE, c'est d'abord un bouclier quasi-illimité de liquidités pour garantir le financement des entreprises via les banques. La BCE a fourni mardi 109 milliards de liquidité additionnelle aux banques. Et à partir de juin, nous mettons en place un mécanisme ultra-incitatif de financement des entreprises. Ce mécanisme permettra aux banques de se financer à - 0,75 % - soit moins que le taux de dépôt à la BCE, une grande première - à condition qu'elles maintiennent leurs crédits à l'économie. 

Les pouvoirs publics français apportent quant à eux un bouclier de solidité, avec le chômage partiel, les reports de charges fiscales et sociales et la garantie bancaire à hauteur de 300 milliards pour la trésorerie des entreprises, et c'est parfaitement adapté à la situation. Deux boucliers massifs - liquidité et solidité - pour tenir aujourd'hui, et pouvoir repartir vite demain.