La grande crise financière, déclenchée au cours de l’été 2007, s’est traduite par des défis structurels pour l’ensemble de l’industrie financière, en particulier les banques, pour tous ses acteurs ainsi que pour ses « dictateurs bienveillants » : les régulateurs, les superviseurs et les responsables de la politique monétaire. Jusqu’aux événements calamiteux de Lehman Brothers et AIG, les perturbations des marchés financiers étaient considérées comme des « turbulences ». Dans une première phase, afin de prévenir l’implosion du système financier – incluant le système financier parallèle (shadow banking), les banques centrales remplirent leur rôle classique de prêteurs en dernier ressort. Une fois leurs taux d’intérêt réduits à l’éponyme plancher à taux zéro, ce soutien dut être complété par des injections urgentes et massives de liquidités ainsi que par des interventions importantes sur plusieurs marchés d’actifs financiers et de financement. Ces marchés, souvent cruciaux pour les banques autres que les banques de dépôt et pour les banques à activités internationales, connurent un grave dysfonctionnement. Le renouvellement des dettes à court terme se révéla très difficile (coût très élevé), voire impossible, en particulier pour celles en devises étrangères. Les banques centrales durent s’y substituer, devenant ainsi des « teneurs de marché de dernier ressort » (Buiter, 2008).
Les difficultés et les défis de la sphère financière se sont prolongés et se sont révélés encore plus complexes. Les business models qui avaient prévalu au cours des deux dernières décennies ont été questionnés, voire plus fondamentalement remis en cause. Le passage d’un modèle de « octroi-conservation » (originate and hold) à un modèle « octroi-cession » (originate and distribute), c’est-à-dire à un modèle d’externalisation de la surveillance du risque de crédit par la vente de produits structurés, fut particulièrement critiqué. Cette délégation de l’évaluation du risque de crédit à des « marchés » anonymes s’est traduite par l’existence d’une classe d’actifs – de créances – dont l’opacité renforçait tant le risque que l’incertitude. Ces produits, dont l’objet est de permettre la diversification des risques, n’ont fonctionné ni en pratique, ni en théorie. En réalité, ce fut l’inverse – un point souligné par Rajan (2006), Longstaff et Rajan (2008) et d’autres économistes financiers.
Cette crise financière globale eut un impact supplémentaire en Europe et sur l’Union monétaire européenne (UME). Pendant presque deux ans et demi, jusqu’à la crise de la dette souveraine grecque – éclatant au printemps 2010 –, la zone euro était considérée comme le bouclier le plus efficace pour protéger les États membres les plus petits contre les dégâts causés par les marchés financiers, comme cela fut le cas lors du Système monétaire européen (période d’ancrage des taux de change). Ainsi, les lacunes du cadre institutionnel de l’UME se sont révélées. L’interdépendance ombilicale entre les banques à problèmes et les États souverains fragiles – l’Irlande est un cas exemplaire – a donné à cette crise sa dimension européenne (zone euro). Elle a également remis en question l’approche prédominante en faveur de l’intégration des marchés bancaires et financiers au sein de l’Union européenne. Depuis le milieu des années 1980, l’ancienne approche en faveur de la séparation des fonctions et de la protection des rentes sur les marchés bancaires par le biais de restrictions d’accès avait laissé la place à la libéralisation et à la déréglementation. L’objectif explicite était d’intégrer les marchés européens dans une dimension transfrontalière en vue d’améliorer le bien-être des consommateurs (hausse du surplus du consommateur, baisse des prix, éventail de choix plus large).
Ce numéro de la Revue d’économie financière (REF) s’intéresse en premier lieu au lien étroit entre États et banques (Paolo Angelini, Giuseppe Grande et Fabio Panetta, Banque d’Italie ; Hans J. Blommestein, OCDE). Viennent ensuite quatre études des systèmes bancaires européens (Laurent Nahmias, BNP Paribas ; Guillaume Gilquin, Trésor, Paris ; Giovanni Ajassa, BNL-BNP Paribas ; Jésus Castillo, Natixis). Il apparaît ainsi qu’il n’existe pas de système bancaire européen, mais des systèmes bancaires en Europe, chacun comportant ses idiosyncrasies nationales. Il n’existe pas non plus de modèle unique par pays puisque coexistent des banques classiques, des caisses d’épargne et des banques coopératives (Dilek Bülbül, Reinhard H. Schmidt et Ulrich Schüwer, université Goethe). En conséquence, les sources de financement des entreprises européennes – plus dépendantes des banques – sont plus différenciées qu’aux États-Unis (Patrick Artus, Natixis). Jusqu’à la crise financière globale, l’intégration bancaire et financière s’effectuait à des rythmes différents. Les marchés monétaires interbancaires étaient presque parfaitement intégrés, mais depuis la crise, on assiste à une resegmentation (Joachim Nagel, Deutsche Bundesbank). La seule exception à ce recul de l’intégration porte sur l’infrastructure des systèmes de paiement grâce au SEPA (Hervé Sitruck, MANSIT).
Dans le prochain numéro de la REF, nous mettrons notamment l’accent sur les perspectives en matière de réglementation et de surveillance. Ces aspects auront bien évidemment une influence sur la façon dont les banques mèneront leurs activités et sur les résultats qu’elles peuvent espérer (Elena Carletti, IUE, Florence ; Franklin Allen, Wharton ; Thorsten Beck, Tilburg). Les banques seront incitées à se tourner vers de nouvelles activités rémunératrices (Sylvie Mathérat, Banque de France). Enfin, la nécessité de réformes structurelles n’a clairement jamais été aussi facile à prouver (Erkki Liikanen, Banque de Finlande). Toutefois, ce ne sont pas les banques universelles en tant que telles qui ont été à l’origine de tous les problèmes. Bien au contraire, elles peuvent même être un facteur de stabilisation systémique (Jörg Schildbach et Bernhard Speyer, Deutsche Bank). De plus, avec Bâle III, ou plus exactement avec la CRD IV dans sa version européenne, des efforts très importants de réglementation sont sur le point d'être mis en œuvre de manière plus large et plus homogène qu’aux États-Unis (Christian Noyer, Banque de France). À une autre échelle, il semble pertinent de réévaluer les exigences de fonds propres basées sur les risques, en particulier quand elles reposent sur les modèles internes des banques (Andrew Haldane et Vasileios Madouros, Banque d’Angleterre). Quoi qu’il en soit, les autorités européennes de réglementation sont en train de lancer un élément très ambitieux et en même temps indispensable à la réussite d’une union monétaire, à savoir l’union bancaire, en commençant par l’approche européenne de la surveillance (Jörg Asmussen, BCE). Le mécanisme de surveillance unique soulève un certain nombre de problèmes en termes de gouvernance, notamment concernant les modalités de transparence, étant donné qu’en fin de compte, c’est l’argent des contribuables qui est en jeu (Donato Masciandaro, Bocconi et María J. Nieto, Banque d’Espagne).
Par ailleurs, nous proposons également trois articles plus généraux, un peu « hors-série » sur l’évolution de la gouvernance du risque au sein des banques et de la réglementation bancaire (Jean Dermine, INSEAD), sur le rôle de la confiance, du capital et de la concurrence dans le secteur bancaire (Thomas Gehrig, université de Vienne) et sur les opérations transfrontalières des banques de détail au cours de la crise (Harald Sander, université de Cologne ; Stefanie Kleimeier, université de Maastricht).
Conséquence de la crise, de nombreuses banques ont eu besoin de l’aide souvent décriée, mais alors bien visible, de l'État. Le risque d’une contagion systémique incontrôlable entre des banques trop importantes pour être abandonnées a fait porter aux budgets publics un lourd fardeau. En Europe, les derniers recours sont bel et bien les gouvernements nationaux. Du point de vue des investisseurs, cela crée un lien naturel de l'État (qui a en quelque sorte vendu une option de vente) vers les banques. Et ce notamment du fait que les banques sont enclines à investir dans la dette nationale, depuis des temps immémoriaux et pas seulement depuis la pondération de risque de 0 % de Bâle. Paolo Angelini et ses collègues analysent les mécanismes par le biais desquels les risques (d’insolvabilité) des deux catégories interagissent et, éventuellement, s’amplifient et se renforcent mutuellement. Ce qui est spécifique au cas européen, où les États sont des « sous-souverains », c’est que les chocs de liquidité se propagent sans aucun soutien de la banque centrale nationale. Le risque pays existe toujours. Cela est lié à la crise : le lien entre les coûts de financement des banques et l’évolution des spreads souverains n’est manifeste que depuis la crise. Ces auteurs soulignent qu’à partir de là, deux défis politiques se posent : la gestion d’un environnement de crise et la suppression ou la réduction du lien. Ils mettent l’accent sur le fait que des finances publiques durables, des exigences plus élevées en matière de fonds propres et une responsabilité fédérale en matière de surveillance sont des atouts pour gérer ces risques. Le revers de cet argument est évoqué par Hans J. Blommestein qui s’intéresse à la dette souveraine du point de vue de l’émetteur. Le nouveau contexte en matière de réglementation et de surveillance impactera les marchés primaires et secondaires des obligations souveraines, et ce, de manière différente. S’il est moins attrayant d'être teneur de marché, moins de capitaux y seront consacrés. Le lien étroit, ou boucle de rétroaction toxique, a une influence à la fois sur les émetteurs et les teneurs de marché, soulevant une foule de questions techniques complexes avec des implications directes pour la stabilité financière. Les conclusions politiques portent sur les procédures d’émission qui apportent liquidité et, par conséquent, résistance et sur la réévaluation du modèle d’opérateur primaire (assouplissement des obligations de cotation, par exemple). Avec une moindre capacité de stockage, la volatilité devrait mécaniquement s’intensifier.
Malgré l’Acte unique européen et l’introduction de l’euro, les marchés bancaires et financiers européens affichent toujours, après toutes ces années, des caractéristiques nationales assez distinctes. Quatre études de cas en témoignent. Laurent Nahmias propose la première d’entre elles, qui ne concerne pas un marché de l’UME, mais malgré tout le marché le plus internationalisé, via la City de Londres. Le secteur bancaire du Royaume-Uni a eu grandement besoin du soutien de l'État. Par conséquent, le ratio « dette publique/PIB » a presque doublé. Une structure de défaisance (à savoir une société de gestion des actifs toxiques) a été créée et une recapitalisation publique massive a été mise en place pour trois banques. Étant donné la gravité de la crise, il semble logique que le Royaume-Uni ait subi les plus importantes modifications réglementaires et de mise en œuvre de la surveillance. La Banque d’Angleterre est de nouveau chargée de la surveillance bancaire (entre autres), en plus de la politique monétaire et de la stabilité macrofinancière. Les réformes structurelles des propositions de la commission Vickers sont mises en œuvre. La Banque d’Angleterre tient également à la constitution d’importants coussins de fonds propres. En parallèle, deux effets éventuels sont toujours restés dans un coin de la tête des autorités de réglementation : la position de Londres et l’attractivité comparative des banques parallèles (shadow banks). Guillaume Gilquin revient sur la structure à trois piliers du secteur bancaire allemand : institutions du secteur privé, caisses d’épargne du secteur public (etLandesbanken) et banques coopératives ainsi que les deux institutions centrales. Si les coûts sont relativement bas (en particulier en raison des importants investissements technologiques), les marges sont basses elles aussi. Le faible écart entre le prix et le coût marginal indique clairement l’importance de la pression de la concurrence. Par conséquent, dans un marché fortement disputé avec de faibles marges, un certain nombre de banques allemandes, quel que soit leur statut juridique, ont opté pour un substitut de l’activité de crédit (Kreditersatzgeschäft) qui présente en apparence de fortes marges et peu de risques. Ces investissements, qui se sont révélés toxiques après coup, ont notamment causé la perte de plusieurs banques d’investissement américaines. Ils ont été fortement problématiques pour nombre de grandes banques universelles internationales et ont posé de gros problèmes à certaines banques privées et Landesbanken (secteur public). Ils n’ont, par contre, pas touché la grande majorité des banques allemandes, au moins en ce qui concerne leurs retombées. La raison en est simple : ces investissements étaient étroitement liés aux activités (crédits structurés) et mécanismes de financement (financement de gros, mise en pension) dans lesquels les banques coopératives ou caisses d’épargnes ainsi que de nombreuses petites et moyennes banques n’étaient pas engagées. Pour ce qui concerne l’Italie, Giovanni Ajassa souligne le fait que, malgré la plus grave récession depuis la Seconde Guerre mondiale, le secteur bancaire y « a fait preuve d’une remarquable capacité de résistance » (selon les termes du FMI – Fonds monétaire international). Quoi qu’il en soit, sans surprise, la qualité des prêts est (et va devenir) un problème croissant. En outre, les retombées des problèmes de dette publique en Italie laissent des traces dans les bilans des banques et dans les coûts de financement. Les banques italiennes réagissent en diminuant le nombre de succursales et d’employés. Elles atténuent également les risques en réduisant la taille de leurs bilans. Les finances du secteur privé sont relativement solides. Dans ce contexte, les rendements des banques semblent afficher une tendance à la hausse, conséquence de la forte baisse attendue du coefficient d’exploitation. Enfin, Jésus Castillo, après une description de la lente évolution du secteur bancaire espagnol, souligne la dualité ou la dichotomie de sa structure : d’une part, les banques privées souvent fortement internationalisées qui dominent le secteur et, d’autre part, lescajas de ahorros, à forte orientation domestique et basées sur un modèle bancaire coopératif, qui s’adressent aux petits épargnants à l’échelle régionale. Avant la crise, principalement pour des raisons de proximité, ces institutions étaient considérées comme bien capitalisées et assez performantes. Nonobstant les facteurs externes, avec l’éclatement de la bulle immobilière, des problèmes latents sont apparus après coup. La restructuration du secteur bancaire espagnol est actuellement en cours. Les cajas sont censées se concentrer à nouveau sur leurs points forts en s’adressant à une clientèle locale. Les structures de gouvernance sont elles aussi ajustées, en limitant l’influence du secteur public.
Dilek Bülbül, Reinhard H. Schmidt et Ulrich Schüwer partent du fait que les caisses d’épargne du secteur public et les banques coopératives ont historiquement joué un rôle dominant sur de nombreux marchés européens. Ces institutions se différencient par plusieurs caractéristiques, les plus importantes étant la mission publique et l’appartenance au secteur public (sans être la propriété de l'État) des caisses d’épargne, l’indépendance économique des banques coopératives (et non la recherche du profit) et leur orientation régionale. En outre, ces institutions, notamment les banques coopératives et les caisses d’épargne allemandes, ont réalisé des économies d’échelle (et de gamme) en externalisant nombre de leurs activités à leurs associations (Verbände). Il pourrait s’agir de l’une des raisons pour lesquelles les Sparkassen et les Volksbanken allemandes sont restées si proches de leurs racines historiques, comme le démontre un aperçu concis concernant cinq pays européens. Pour conclure, ces mêmes auteurs soulignent que ces institutions à vocation régionale, en particulier en raison de la pression moins importante sur les rendements des capitaux propres (reflétant leur base d’actionnaires et de parties prenantes), contribuent à la stabilité systémique. Étant donné l’ignorance fondamentale de ce qui constitue le meilleur système financier, ils insistent sur le principe de diversité qui plaide en faveur de la préservation de la viabilité de ces institutions.
Du point de vue de la politique publique, les banques (intermédiaires financiers) sont essentiellement utiles dans la mesure où elles atteignent leur(s) objectif(s) : par exemple, contribuer au financement des entreprises de façon rentable. Patrick Artus décrit deux modèles de financement externe : le modèle européen dépendant des banques et le modèle américain davantage axé sur le marché des capitaux (sans intermédiaire, basé, voire presque exclusivement, sur les obligations). Deux critères sont pertinents : l’accès au crédit (l’intensité du rationnement du crédit en temps de crise) et le coût total des fonds. La distinction intéressante entre financement continu (banques) et discontinu (marchés) est ici approfondie. Aux États-Unis, les entreprises se reposent en fait davantage sur les marchés anonymes, ce qui reflète bien entendu leur taille relativement plus importante qui leur permet de faire face aux coûts fixes élevés qui accompagnent l’accès aux marchés des capitaux. L’efficacité de la mise en œuvre de la politique monétaire (en temps de crise) est également analysée. Alors que le canal de transmission basé sur le crédit de la BCE (Banque centrale européenne) était détérioré, pour diverses raisons, la capacité de la Federal Reserve américaine à contrôler les conditions monétaires par le biais du prix des actifs (assouplissement quantitatif I à III) s’est révélée plus efficace. En revanche, au vu de la taille des entreprises européennes, qui implique une forte asymétrie d’information, le choix du financement par les marchés ne va pas se faire de sitôt.
Les deux dernières contributions concernent les problèmes d’infrastructures. En effet, les infrastructures sont le domaine dans lequel l’intégration a été, de façon quelque peu exogène, favorisée par les autorités publiques. Joachim Nagel considère le marché monétaire interbancaire comme une caisse de résonance des problèmes sous-jacents des bilans des banques et de leur réticence à s’exposer aux autres banques (et implicitement de leur exposition respective au risque souverain ou privé). Avant la crise, c’est-à-dire jusqu’à l’été 2007, il n’y avait quasiment pas d’écart entre les prêts interbancaires garantis et non garantis. Cela signifiait également que les prêts garantis étaient relativement rarement utilisés. Aujourd’hui, il existe des écarts entre les prêts interbancaires non garantis et garantis, sous l’effet des primes de défaillance entre autres, et les prêts garantis représentent un volume trois fois plus important. La question de savoir si les banques centrales doivent intervenir, en plus de fournir au marché un niveau suffisant de liquidité (dans le jargon de la BCE : lebenchmark), est traitée à la lumière des conséquences éventuelles sur la stabilité financière et monétaire. Au cours de la crise, la BCE a bien entendu accepté un rôle d’intermédiaire à grande échelle, rôle qu’elle joue toujours. D’une certaine manière, ce que nous vivons actuellement pourrait être interprété comme une normalisation : des écarts existent à nouveau, les transactions garanties prédominent. Mais il existe également un besoin évident de plus de transparence et de connaissance du marché. C’est le secteur des paiements de détail qui a enregistré le niveau d’intégration le plus faible, en termes de dispersion des prix ou de flux transfrontaliers. Hervé Sitruk décrit dans les grandes lignes la voie vers un Espace unique de paiement en euros et insiste sur l’ambition des autorités publiques qui ont parfois dû faire face à l’opposition farouche des membres du secteur. Ils y voyaient, non sans raison, une menace pour leurs rentes. Cela explique aisément pourquoi l’Espace unique de paiement en euros s’est fait si longtemps attendre. Sur les marchés caractérisés par des externalités de réseau et des économies d’échelle, les acteurs anciennement dominants ont beaucoup à perdre. Les consommateurs (et les entreprises) ne se convertissent qu’avec réticence quand les coûts de changement sont apparemment élevés. C’est l’une des raisons de la lenteur de la mise en œuvre du système IBAN. Pour évaluer ce que l’avenir de l’Europe pourrait être dans le secteur des paiements, l’auteur tire certaines conclusions à partir du secteur des paiements français qu’il juge comme le plus dynamique.
La grande crise financière et ses retombées européennes ont radicalement modifié les conditions de base du système bancaire européen. Les principes fondamentaux (ou économiques) de l’intermédiation financière restent toutefois inchangés. C’est pourquoi l’objectif de création d’un marché bancaire unique, poursuivi depuis longtemps par l’Europe, est toujours pertinent du point de vue de la politique publique ou du bien-être : il devrait améliorer l’efficacité de l’intermédiation (réduire les marges ou les rentes), diversifier l’éventail de choix du consommateur et réduire les prix. Cela s’accompagne d’une contrainte : les exigences en matière de stabilité financière doivent être respectées. Pourtant, certains obstacles aux activités transfrontalières sont réapparus. Et cela ne concerne pas uniquement les banques de détail. Une meilleure intégration des marchés de gros implique de réduire le lien entre banques et États et requiert également un cadre de surveillance fédéral cohérent. Au vu de ce que nous savons des économies d’échelle dans le secteur bancaire et à la lumière des objectifs macroprudentiels, la consolidation ne constitue pas une proposition convaincante.