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 La stratégie de politique monétaire de la Banque centrale européenne


Philip R. LANE * Membre du directoire, Banque centrale européenne (BCE). Contact: office.lane@ecb.europa.eu.Les opinions exprimées dans cet article sont personnelles. L'exercice de revue de la stratégie de politique monétaire a bénéficié du dévouement et de l'expertise d'un grand nombre de professionnels de la BCE et de l'Eurosystème, ainsi que des contributions de nombreux universitaires et autres observateurs extérieurs. Merci à Fabian Eser et Christophe Kamps pour leurs commentaires et à Janina Desoi pour son aide dans la préparation de cet article.

Cet article présente les principales caractéristiques de la nouvelle stratégie de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Dans le cadre de cette stratégie, la BCE vise à stabiliser l'inflation à 2 % à moyen terme. Elle adopte un point de vue symétrique sur les écarts par rapport à cet objectif : les dépassements dans un sens ou dans l'autre sont considérés comme également indésirables. Dans le même temps, la stratégie tient pleinement compte des implications de la borne inférieure effective : étant donné que les taux directeurs sont effectivement fixés à un niveau plancher, il est nécessaire, d'un point de vue stratégique, de recourir également à des indications sur les taux d'intérêt, à des achats d'actifs et à des opérations ciblées de refinancement à long terme pour garantir la réalisation de l'objectif d'inflation. La nouvelle stratégie vise également à intégrer les implications du changement climatique et de la transition carbone pour l'évolution macroéconomique et l'inflation.

La Banque centrale européenne (BCE) a publié sa nouvelle stratégie de politique monétaire en juillet 2021. Le processus de revue de la stratégie avait été lancé en janvier 2020, mais avait été interrompu par la pandémie. Au cours de la période 2020-2021, le Conseil des gouverneurs a organisé onze séminaires pour débattre des différents sujets de la revue. Ces débats se sont appuyés sur la recherche considérable effectuée au sein de l'Eurosystème : il y avait treize groupes de travail et les nombreuses différentes prises de notes ont été synthétisées dans les dix-huit documents de travail appelés Occasional Papers qui ont été publiés à l'automne 20211. La revue de la stratégie a également bénéficié des phases antérieures du développement de la stratégie de politique monétaire de la BCE, tant en ce qui concerne la conception initiale en 1998 que la revue de 20032.

L'exercice de revue de la stratégie avait trois grands objectifs, dans le cadre de la mise en œuvre du mandat de la BCE tel que défini par le traité3. Premièrement, si le mandat du traité consiste à assurer la stabilité des prix, il est important de fixer un objectif opérationnel clair pour la politique monétaire. En particulier, il a fallu évaluer si l'objectif identifié dans la revue de 2003 (d'une inflation inférieure à, mais proche de, 2 %) devait être révisé. Deuxièmement, compte tenu des implications de divers changements structurels pour la mise en œuvre de la politique monétaire, pour un objectif donné, l'approche et les instruments de politique monétaire permettant d'atteindre cet objectif devraient également être revus régulièrement. Troisièmement, le changement climatique et la transition bas-carbone devraient exercer une influence de premier ordre sur les résultats macroéconomiques (avec les implications qui en découlent pour les évolutions nominales) dans les années à venir, de sorte qu'une stratégie de politique monétaire prospective devrait intégrer ces considérations.

Dans la suite de cet article, je me concentre sur ces trois éléments. Tout d'abord je traite de l'objectif d'inflation. Ensuite je me penche sur la mise en place de la politique monétaire pour atteindre cet objectif. Et enfin je présente l'approche adoptée pour intégrer le changement climatique et la transition bas-carbone.

L'objectif d'inflation

La nouvelle stratégie vise une inflation de 2 % à moyen terme. Elle adopte un point de vue symétrique sur les écarts par rapport à cet objectif : les dépassements et les insuffisances sont considérés comme tout aussi indésirables.

Cet objectif remplace le précédent d'une inflation « inférieure à, mais proche de, 2 % », qui avait été adopté lors de la revue de 2003. Il remplace également la version de 1998 selon laquelle la stabilité des prix était définie comme une augmentation annuelle de l'IPCH (indice des prix à la consommation harmonisé) inférieure à 2 % (autrement dit, la définition de la stabilité des prix correspondait à un taux d'inflation compris entre 0 % et 2 %). La nouvelle stratégie de politique monétaire repose plutôt sur une définition générale qualitative : la stabilité des prix peut être considérée comme un état dans lequel les variations du niveau général des prix ne doivent pas être prises en compte dans les décisions de consommation et d'investissement. Ainsi, la meilleure façon d'assurer la stabilité des prix est de viser une stabilisation de l'inflation à 2 % à moyen terme.

L'une des raisons fondamentales de l'adoption d'un objectif spécifique est qu'il permet une communication plus claire. De manière plus générale, la revue de la stratégie a montré que l'importance d'un style de communication plus simple était fortement souhaitable. En plus de fournir un point d'ancrage plus clair pour les anticipations d'inflation, un engagement stratégique visant à simplifier la communication de la politique monétaire permet également de mieux rendre compte des activités de la BCE et de renforcer la confiance de l'opinion publique4.

La revue de la stratégie a montré que les trois argumentaires de longue date en faveur d'un objectif d'inflation positif (par opposition à une simple tentative de maintien du niveau des prix constant) restent d'actualité5. Ce sont (1) les biais de mesure inhérents aux indices de prix, (2) la rigidité à la baisse des salaires nominaux et (3) la facilitation des ajustements de taux de change réels au sein d'une union monétaire regroupant différents pays. En effet, l'impact macroéconomique sévère de l'épisode des crises jumelles (la crise financière mondiale en 2008-2009 et la crise de la dette souveraine de la zone euro en 2010-2012) fournit des indications tangibles sur le fait que les rigidités nominales sont omniprésentes et que l'ajustement des prix relatifs entre les pays membres est inhibé par un environnement de faible inflation6.

En outre, la tendance baissière du taux d'intérêt réel d'équilibre a confirmé le bien-fondé d'une marge d'inflation positive : ce facteur, qui n'avait pas été pris en compte dans la revue de 2003, a été un thème central de la revue de 20217. En général, la contrainte de la borne inférieure effective signifie qu'il existe une relation inverse entre le taux d'intérêt réel d'équilibre et l'objectif d'inflation optimal : au cours du cycle, la marge de manœuvre de la politique monétaire est protégée en veillant à ce que le taux d'intérêt nominal à l'état stationnaire soit suffisamment élevé pour permettre à la politique monétaire de contrer efficacement les chocs. Le taux d'intérêt nominal à l'état stationnaire est donc simplement la somme du taux d'intérêt réel d'équilibre et de l'objectif d'inflation : toutes choses étant égales par ailleurs, si le premier terme de l'équation baisse, le second doit être relevé. Il s'ensuit que les argumentaires en faveur d'un objectif d'inflation de 2 % par rapport à un objectif inférieur ont été renforcés par la tendance baissière du taux d'intérêt réel d'équilibre. Une considération supplémentaire concerne le fait que dans le contexte d'une économie mondiale intégrée et d'un système financier mondial, la valeur exacte de l'objectif d'inflation doit tenir compte des objectifs d'inflation des autres grandes banques centrales. Des objectifs d'inflation sensiblement équivalents signifient que si les objectifs sont atteints, l'évolution des taux de change nominaux devrait refléter dans les grandes lignes l'évolution des taux de change réels.

En ce qui concerne la symétrie de l'objectif d'inflation, il est important pour la politique monétaire de reconnaître que les insuffisances et les dépassements sont tout aussi indésirables. En plus de clarifier le fait que le taux de 2 % doit être considéré comme le point névralgique (plutôt que comme un plafond), la symétrie de l'objectif signifie que les risques dans les deux sens par rapport à l'objectif d'inflation doivent être considérés comme tout aussi indésirables, et donc être intégrés dans une approche de gestion des risques pour le calibrage de la politique monétaire. Par conséquent, la symétrie de l'objectif n'implique pas nécessairement la symétrie des réactions des autorités face à ces risques, compte tenu de la borne inférieure effective. Je reviendrai sur ce sujet dans la partie suivante de cet article.

Enfin, la revue de la stratégie a également conclu que si l'IPCH reste la mesure des prix adéquate pour évaluer la réalisation de l'objectif de stabilité des prix, sa mesure doit être révisée afin d'inclure plus exhaustivement les coûts liés aux logements occupés par leurs propriétaires, selon une approche d'acquisition nette. Étant donné que cela n'est possible que dans le cadre d'un projet pluriannuel (mené par Eurostat), le Conseil des gouverneurs tiendra compte, entre-temps, des mesures de l'inflation qui incluent des estimations initiales des coûts liés aux logements occupés par leurs propriétaires dans sa série plus vaste d'indicateurs supplémentaires de l'inflation. En outre, il est reconnu qu'en principe, les décisions de politique monétaire devraient, dans la mesure du possible, différencier les composantes de consommation et d'investissement de l'indice des prix des logements occupés par leurs propriétaires, car c'est la première composante qui est pertinente.

Atteindre l'objectif d'inflation

Dans le cadre de cette stratégie, la BCE s'engage à veiller à ce que l'inflation se stabilise à son objectif de 2 % à moyen terme. Bien que l'objectif soit symétrique, la borne inférieure effective du taux d'intérêt signifie que les réactions de la politique aux chocs positifs ou négatifs ne doivent pas nécessairement être symétriques8. En particulier, lorsque l'économie est proche de cette borne inférieure (soit à la suite d'une série de chocs négatifs, soit simplement en raison d'un taux d'intérêt réel d'équilibre suffisamment bas pour que même le taux d'intérêt nominal à l'état stationnaire soit proche de la borne inférieure), les mesures de politique monétaire doivent être particulièrement vigoureuses ou persistantes pour éviter que les écarts négatifs par rapport à l'objectif d'inflation ne perdurent. L'adoption de mesures vigoureuses ou persistantes peut également impliquer une période transitoire au cours de laquelle l'inflation devient légèrement supérieure à l'objectif, étant donné qu'une orientation durablement accommodante qui réussit à ramener l'inflation vers l'objectif peut impliquer une dynamique d'ajustement en forme de bosse de la trajectoire d'inflation.

À l'état stationnaire, une intervention initialement vigoureuse face à un choc négatif peut limiter le risque de se rapprocher de la borne inférieure effective. L'adoption d'une fonction de réaction vigoureuse s'oppose à une approche incrémentale des mesures d'assouplissement de la politique monétaire, qui repose sur l'hypothèse qu'il est possible de prendre de nouvelles mesures d'assouplissement si les premières mesures s'avèrent insuffisantes. La borne inférieure effective limite les possibilités d'incrémentalisme. Par ailleurs, le maintien de certaines mesures de politique monétaire de façon durable constitue une reconnaissance du fait qu'un engagement à maintenir une politique monétaire accommodante à l'avenir peut se substituer partiellement à des mesures d'assouplissement plus marquées à court terme.

En ce qui concerne les instruments de politique qui peuvent être déployés pour atteindre l'objectif, l'ensemble de taux d'intérêt directeurs est primordial et devrait être suffisant tant que l'économie n'opère pas dans l'ombre de la borne inférieure effective et que les conditions financières ne sont pas tendues. À cet égard, la baisse des taux directeurs en territoire négatif a été un moyen efficace d'étendre la marge de manœuvre de la politique monétaire. En outre, la forward guidance (guidage des anticipations) peut jouer un rôle important en soutenant une position de politique monétaire systématique lorsque la borne inférieure effective devient contraignante. Les programmes d'achat d'actifs et les opérations de refinancement à plus long terme (le cas échéant, ciblées) peuvent constituer un renfort supplémentaire9. De plus, il s'avère que ces différents instruments se renforcent entre eux. Plus généralement, la BCE continuera à faire preuve de souplesse face aux nouveaux défis qui se présenteront et à envisager, le cas échéant, de nouveaux instruments de politique monétaires pour atteindre son objectif de stabilité des prix. À tout moment, la combinaison optimale d'instruments doit être conçue en tenant compte de l'efficacité relative et des effets secondaires de chaque instrument10.

La conception des mesures de politique monétaire dans l'ombre de la borne inférieure effective est bien illustrée par la révision de la forward guidance sur les taux d'intérêt qui a été annoncée par la BCE dans le sillage de la nouvelle stratégie de politique monétaire11. Elle décrit trois conditions essentielles qui doivent être remplies avant de relever les taux d'intérêt : (1) la première condition « jusqu'à ce que [le Conseil des gouverneurs] ait constaté que l'inflation [...] atteint 2 % bien avant la fin de son horizon de projection » rassure sur le fait que la convergence de l'inflation vers un nouvel objectif doit être suffisamment avancée et aboutie au moment du relèvement des taux directeurs. En outre, le fait d'exiger que l'objectif d'inflation soit atteint « bien avant la fin de son horizon de projection » contribue à protéger la politique monétaire contre le risque de réagir aux erreurs de prévision, qui ont tendance à être plus importantes à des horizons plus lointains ; (2) la deuxième condition, à savoir que l'inflation devrait atteindre 2 % non seulement bien avant la fin de l'horizon de projection, mais aussi « durablement pour le reste de l'horizon de projection », indique clairement que l'objectif d'inflation doit être atteint de façon durable et ne pas être uniquement le résultat de forces éphémères qui induisent des augmentations ponctuelles des prix, peu susceptibles d'entraîner une hausse persistante de l'inflation d'une année sur l'autre ; et (3) la troisième condition, à savoir « les progrès réalisés sur le front de l'inflation sous-jacente sont suffisamment avancés pour être compatibles avec une stabilisation à 2 % à moyen terme », indique que les taux directeurs ne seront normalisés que si le Conseil des gouverneurs estime que l'inflation sous-jacente a également fait des progrès satisfaisants vers l'objectif. Cette condition est basée sur des données réalisées. Elle fournit une protection supplémentaire contre un resserrement de la politique monétaire face à des chocs liés aux coûts qui pourraient temporairement augmenter l'inflation globale, mais s'estomper au cours de l'horizon de projection. Il est important de garder à l'esprit que l'inflation sous-jacente est un vaste concept qui fait référence à la composante récurrente de l'inflation qui filtre les variations réversibles à court terme du taux d'inflation et fournit la meilleure indication de l'évolution de l'inflation à moyen terme.

La nouvelle forward guidance sur les taux est motivée par l'importance de la robustesse des décisions de politique monétaire et vise à équilibrer deux considérations. Premièrement, il convient d'accorder un poids important aux progrès réalisés en matière d'inflation sous-jacente. Dans un monde où il existe une multitude de formes d'incertitude liées à l'ampleur et à la propagation des chocs, aux divers changements structurels, à la qualité et à la ponctualité des données ainsi qu'à la conception et à la calibration des modèles, il est logique de tenir compte des données observées, plutôt que de s'appuyer uniquement sur des prévisions pluriannuelles12. Cet aspect est particulièrement pertinent aux abords de la borne inférieure effective, au vu de l'importance d'éviter toute décision de resserrement qui pourrait s'avérer prématuré et pourrait entraîner un affaiblissement de la dynamique de l'inflation et un désancrage des anticipations d'inflation à la baisse. Parallèlement, les chocs temporaires signifient que les données réalisées peuvent ne pas constituer un repère suffisamment précis : la détection de l'inflation sous-jacente (la composante persistante qui est le repère important pour l'évolution future de l'inflation) est sujette à une incertitude considérable, notamment lors de périodes atypiques (comme celle de la pandémie actuelle).

Deuxièmement, compte tenu des limites des résultats obtenus en matière d'inflation, il serait peu judicieux de ne pas prendre en compte les informations prospectives, telles qu'elles ressortent des projections macroéconomiques et d'autres indicateurs, malgré les difficultés inhérentes à l'établissement de prévisions. Dans un sens, si l'inflation actuelle est inférieure au niveau cible, mais que les prévisions indiquent que l'objectif d'inflation sera atteint au cours de l'horizon de projection, attendre que l'inflation réalisée atteigne l'objectif avant de resserrer la politique monétaire pourrait être excessivement coûteux, surtout si les anticipations d'inflation augmentent. Dans ce scénario, un retard excessif du resserrement monétaire entraîne le risque d'une hausse ultérieure plus forte des taux d'intérêt et d'une perte plus importante en termes de production. Dans l'autre sens, si l'inflation actuelle est supérieure au niveau cible, mais que les prévisions indiquent que l'inflation tombera en dessous du niveau cible sur l'horizon de projection (comme c'était le cas dans les projections du mois de décembre 2021), un resserrement de la politique en réaction à une inflation temporairement élevée serait contre-productif.

Par conséquent, la forward guidance sur les taux engendre un équilibre entre les indicateurs fondés sur les résultats et ceux fondés sur les prévisions. Il s'ensuit que la mise en œuvre réussie de cette forward guidance sur les taux nécessitera le jugement expert du Conseil des gouverneurs. Parmi d'autres facteurs, il faut faire preuve d'humilité dans l'évaluation de la dynamique des anticipations d'inflation. De façon générale, il est bien connu que les propriétés des modèles macroéconomiques sont assez sensibles au processus exact qui détermine la formation des anticipations d'inflation (voir, parmi beaucoup d'autres, Honkapohja et McClung, 2021). Dans le contexte de la zone euro, sa courte histoire en tant qu'union monétaire ainsi que les diverses expériences historiques d'inflation à long terme des différents pays membres compliquent encore l'évaluation des anticipations d'inflation.

Conformément au mandat du traité et sans porter atteinte à la stabilité des prix, l'orientation à moyen terme tient compte des inévitables écarts à court terme de l'inflation par rapport à son objectif, ainsi que des décalages et des incertitudes dans la transmission de la politique monétaire à l'économie et à l'inflation. Il permet également à la politique monétaire de prendre en compte des considérations telles qu'une croissance économique équilibrée, le plein-emploi et la stabilité financière. Dans de nombreux scénarios, une croissance économique équilibrée, le plein-emploi et la stabilité des prix sont des objectifs qui sont compatibles entre eux. En particulier, tant que les anticipations d'inflation à long terme sont ancrées au niveau de l'objectif, l'inflation atteindra l'objectif si l'activité économique et l'emploi atteignent leurs niveaux potentiels. Toutefois, en cas de choc d'offre défavorable, l'horizon sur lequel l'inflation revient au niveau de l'objectif pourrait être repoussé afin d'éviter des baisses prononcées de l'activité économique et de l'emploi qui, si elles persistent, pourraient compromettre la stabilité des prix à moyen terme13.

Compte tenu des risques pour la stabilité des prix générés par les crises financières, la BCE a tout intérêt, d'un point de vue conceptuel, à prendre en compte les considérations de stabilité financière dans ses délibérations de politique monétaire14. De façon générale, ce point de vue conceptuel a reçu beaucoup d'attention dans la littérature spécialisée ces dernières années (voir, entre autres, Woodford, 2012 ; Smets, 2014 ; Woodford, 2016 ; Akinci et al., 2020 ; Stein, 2020).

Il est utile de souligner certaines problématiques fondamentales dans la réflexion sur l'interrelation entre la politique monétaire et la stabilité financière. Premièrement, les politiques macroprudentielles peuvent grandement contribuer à atténuer les risques pesant sur la stabilité financière15. Toute analyse de l'interrelation potentielle entre la politique monétaire et la stabilité financière devrait être conditionnée par l'orientation de la politique macroprudentielle en vigueur, tant au niveau national qu'au niveau de la zone euro. La mise en œuvre de la politique macroprudentielle en Europe étant relativement récente, on ne dispose que d'un éventail limité de données pour mener l'évaluation empirique de l'efficacité de la politique macroprudentielle et de ses implications pour une politique monétaire optimale. De plus, la modélisation de la politique monétaire devrait tenir compte de l'impact du cadre de la politique macroprudentielle.

Deuxièmement, les considérations de stabilité financière sont plus facilement intégrées si les anticipations d'inflation sont solidement ancrées à l'objectif. Autrement, toute mesure de politique monétaire motivée par des considérations de stabilité financière risquerait d'affaiblir les anticipations d'inflation, ce qui pourrait avoir des conséquences significatives à long terme sur la concrétisation effective de l'objectif d'inflation.

Troisièmement, la proximité de la borne inférieure effective réduit la portée de l'argumentaire traditionnel selon lequel l'assouplissement de la politique monétaire en réaction à une crise financière peut être plus efficace qu'un resserrement préventif : cela implique que, d'un point de vue théorique, il peut exister des scénarios dans lesquels il existe effectivement une tension entre la stabilité des prix sur l'horizon traditionnel de la politique monétaire (jusqu'à trois ans) et la stabilité des prix sur des horizons plus longs (le cycle financier est généralement évalué à environ deux fois cette durée).

En même temps, il est plus facile d'identifier cet arbitrage potentiel à un niveau conceptuel que de définir les circonstances exactes dans lesquelles le risque à long terme pourrait nécessiter un ajustement de la politique monétaire. En particulier, étant donné que les crises financières sont des événements rares, il est difficile de concevoir et de calibrer des modèles macrofinanciers qui soient capables de saisir à la fois les fluctuations du cycle économique (y compris la dynamique de l'inflation) et les fluctuations du cycle financier16. En outre, l'efficacité quantitative des mesures de politique monétaire dans l'atténuation significative des risques pour la stabilité financière doit être soigneusement évaluée, compte tenu notamment du rôle d'autres facteurs (tels que le niveau du taux réel d'équilibre, la dynamique de l'effet de levier et les convictions des investisseurs) dans la détermination des prix des actifs et des comportements d'investissement. En outre, si l'on ne modifie pas son impact sur la stabilité des prix, l'impact quantitatif d'une mesure de politique monétaire sur la stabilité financière doit être évalué parallèlement à son impact sur d'autres facteurs, tels que l'emploi.

Pour ces raisons, il est important d'adopter une approche spécifique au contexte pour prendre en compte les considérations de stabilité financière. Toute réaction de la politique monétaire aux préoccupations relatives à la stabilité financière dépendra des circonstances du moment et sera guidée par les implications en termes de stabilité des prix à moyen terme. Il faut également reconnaître que la politique monétaire peut prendre en compte des aspects de stabilité financière par la conception d'instruments de politique monétaire, même si l'orientation de la politique monétaire reste inchangée. Actuellement, la conception du système à deux paliers (tiering) pour la rémunération des réserves excédentaires et l'exclusion des prêts immobiliers des particuliers du panier de prêts éligibles pour les TLTRO sont en partie motivées par des considérations de stabilité financière.

La déclaration de politique monétaire de la BCE du mois de décembre 2021 comporte une évaluation de l'interrelation entre la politique monétaire et la stabilité financière17. Elle constate qu'une politique monétaire accommodante soutient la croissance, ce qui favorise le bilan des entreprises et des institutions financières, tout en prévenant les risques de fragmentation des marchés. Elle reconnaît par ailleurs que l'impact de la politique monétaire accommodante sur les marchés immobiliers et les marchés financiers doit être surveillé de près, car un certain nombre de vulnérabilités à moyen terme se sont intensifiées. Néanmoins la politique macroprudentielle reste la première ligne de défense pour préserver la stabilité financière et remédier aux vulnérabilités à moyen terme.

Cette évaluation est l'une des composantes d'un engagement plus général, pris dans le cadre de la nouvelle stratégie de politique monétaire, de fonder les décisions de politique monétaire, y compris l'évaluation de la proportionnalité de ses décisions et de ses effets secondaires potentiels, sur une évaluation intégrée de tous les facteurs pertinents18. Par rapport à l'ancienne approche analytique à deux piliers, le nouveau cadre intégré met l'accent sur la prise en compte des liens macrofinanciers inhérents entre l'économie réelle, le système monétaire et le système financier en termes de structures sous-jacentes, de chocs et de processus d'ajustement. La revue de la stratégie a été une occasion importante de revoir les priorités en matière de recherche et de développement de modèles, notamment en raison des changements structurels observés depuis la dernière revue en 200319.

Un type important de risque macrofinancier au sein de la zone euro concerne, dans des conditions financières tendues, des mouvements de report transfrontaliers autoréalisateurs sur des valeurs sûres peuvent entraver le mécanisme de transmission de la politique monétaire et menacer la stabilité des prix. Il s'agit d'un risque inhérent à une union monétaire plurinationale, puisque les transferts géographiques de portefeuille sont facilités par l'absence de risque de change (aggravé par le caractère incomplet de l'architecture de l'UEM – Union économique et monétaire – en ce qui concerne l'union fiscale et l'union bancaire) et peuvent être renforcés par l'absence d'instruments de politique monétaire spécifiques à chaque pays20. Bien que la politique monétaire puisse être mise en œuvre de manière uniforme la plupart du temps, la BCE a démontré sa capacité à concevoir des instruments flexibles en réaction à des conditions de stress, par le biais de mesures telles que le Programme pour les marchés de titres (SMP, Securities Market Programme), le Programme des opérations monétaires sur titres (OMT, Outright Monetary Transactions) et le Programme d'achat d'urgence face à la pandémie (PEPP, Pandemic Emergency Purchase Programme).

Bien que lors de la réunion de politique monétaire du mois de décembre 2021, le Conseil des gouverneurs ait décidé de mettre fin aux achats nets d'actifs dans le cadre du PEPP d'ici à la fin de mars 2022, la déclaration de politique monétaire indiquait également : « Dans le cadre du mandat de la BCE, en période de tensions, la flexibilité demeurera un élément de la politique monétaire chaque fois que des menaces sur sa transmission compromettront la réalisation de la stabilité des prix. » En plus de cette reconnaissance générale de la valeur de la flexibilité en période de tensions, la déclaration de politique monétaire a également noté que même après la fin des achats nets, le portefeuille PEPP accumulé pourrait jouer un rôle stabilisateur : « En particulier, en cas de nouvelle fragmentation des marchés due à la pandémie, les réinvestissements au titre du PEPP pourront à tout moment être ajustés de façon souple dans le temps, entre [les] catégories d'actifs et entre les juridictions. »

Le changement climatique et la transition bas-carbone

La transition bas-carbone représente un changement structurel majeur tant pour l'économie mondiale que pour l'économie européenne, avec une transformation économique importante intégrée dans les engagements visant à réduire considérablement les émissions de carbone d'ici à 2030 et à atteindre la neutralité carbone d'ici à 205021. En théorie, une transition durable et prévisible pourrait s'effectuer sans volatilité macroéconomique significative. Toutefois, tant les risques physiques que les risques de transition liés au changement climatique peuvent générer des chocs cycliques qui pourraient nécessiter une intervention de politique monétaire. En effet, ces dernières années, il s'est déjà avéré important de tenir compte, dans nos évaluations macroéconomiques, à la fois des phénomènes météorologiques graves qui perturbent la production mondiale (comme les inondations et les sécheresses dans le monde) et des implications de la transition bas-carbone pour des industries telles que le secteur automobile. En outre, il existe des scénarios de risques extrêmes dans lesquels des chocs physiques graves ou une dynamique de transition désordonnée pourraient menacer la stabilité financière. Au niveau institutionnel, le changement climatique et la transition bas-carbone affectent également la valeur et le profil de risque des actifs détenus au bilan de l'Eurosystème.

Pour ces raisons, le Conseil des gouverneurs s'est engagé à mener un plan d'action ambitieux afin d'intégrer davantage les considérations relatives au changement climatique dans son cadre de politique monétaire22. Premièrement, la BCE renforcera considérablement ses capacités d'analyse et de modélisation macroéconomique et développera des indicateurs statistiques pour favoriser la compréhension de l'impact macroéconomique des politiques de changement climatique et de transition bas-carbone. En particulier, la BCE accélérera le développement de nouveaux modèles et mènera des analyses théoriques et empiriques afin de surveiller les implications du changement climatique et des politiques connexes pour l'économie, le système financier et la transmission de la politique monétaire aux ménages et aux entreprises par le biais des marchés financiers et du système bancaire. Deuxièmement, le Conseil des gouverneurs adaptera la conception de son cadre opérationnel de politique monétaire en ce qui concerne la communication d'informations, l'évaluation des risques, les achats d'actifs du secteur privé et le dispositif de garanties.

Conclusion

La revue de la stratégie pour 2021 pose les fondements des décisions de politique monétaire pour les années à venir. De plus, l'engagement de revoir régulièrement la stratégie garantit que le cadre de la politique monétaire ne se fossilisera pas23. D'ores et déjà, il apparaît clairement que certaines évolutions naissantes pourraient nécessiter de nouvelles révisions dans les années à venir. Il s'agit notamment des progrès éventuels en termes de monnaie numérique, des améliorations de l'architecture de l'UEM et du rôle croissant des établissements non bancaires dans le système financier de la zone euro. De façon plus générale, il pourrait également y avoir des chocs économiques ou financiers imprévus au sein de la zone euro et/ou au niveau des économies mondiales, ainsi que des changements structurels supplémentaires qui affecteraient la croissance potentielle de la production, le taux d'intérêt réel d'équilibre ou le processus d'inflation. Dans ce contexte, le Conseil des gouverneurs entend évaluer périodiquement la pertinence de sa stratégie de politique monétaire, la prochaine évaluation étant prévue en 2025.


Notes

1 Outre la déclaration officielle de la stratégie de la politique monétaire (https://www.ecb.europa.eu/home/search/review/html/ecb.strategyreview_monpol_strategy_statement.en.html), le Conseil des gouverneurs a également publié une note de synthèse explicative (https://www.ecb.europa.eu/home/search/review/html/ecb.strategyreview_monpol_strategy_overview.en.html). Cet article s'appuie sur cette note de synthèse. Le contexte intellectuel de la revue a également été alimenté par des travaux antérieurs, notamment Hartmann et Smets (2018) et Rostagno et al. (2021).
2 Voir Issing (2010).
3 Voir Ioannidis et al. (2021) sur le mandat de la BCE.
4 Voir les travaux du groupe de travail sur la communication de la politique monétaire (2021). La modernisation de la communication de la politique monétaire se remarque déjà par la structure de la déclaration de politique monétaire qui est publiée après chaque réunion de politique monétaire (qui vient remplacer la déclaration liminaire), ainsi que par le format visuel des messages clés des décisions de politique monétaire.
5 Voir Consolo et al. (2021), les travaux des groupes de travail sur l'objectif de stabilité des prix (2021) et sur la mesure de l'inflation (2021).
6 Voir également Koester et al. (2021) pour une analyse des catalyseurs de la faible inflation durant la période d'après-crise de 2013-2019.
7 Voir, par exemple, Andrade et al. (2019).
8 Voir les travaux du groupe de travail sur l'objectif de stabilité des prix (2021).
9 Comme on a pu le constater au printemps 2020, les achats d'actifs peuvent également jouer un rôle important de stabilisation des marchés en cas de tensions.
10 Voir Altavilla et al. (2021). Les mesures optimales de politique monétaire devraient aussi tenir compte de l'orientation de la politique budgétaire et de l'orientation cyclique des mesures de politique macroprudentielle et de surveillance. Comme le détaille le rapport du groupe de travail sur les interactions entre la politique monétaire et la politique budgétaire (2021), la revue de la stratégie inclut une analyse approfondie des interactions entre la politique monétaire et la politique budgétaire, concluant que la politique budgétaire contracyclique (soutenue par des positions budgétaires durables) peut être particulièrement efficace aux abords de la borne inférieure. Pendant la pandémie, les mesures macroprudentielles et de surveillance contracycliques ont amplifié le soutien apporté par les mesures monétaires et budgétaires contracycliques.
11 Voir également Lane (2021a).
12 Voir Faust et Leeper (2015).
13 Voir les travaux du groupe de travail sur l'emploi (2021).
14 Voir les travaux du groupe de travail sur la politique macroprudentielle, la politique monétaire et la stabilité financière (2021).
15 Voir également Martin et Philippon (2017) et Lane (2021b).
16 Pour l'état actuel des connaissances dans ce domaine, voir Adrian et al. (2021).
17 Dans le cadre de la nouvelle stratégie, il est prévu que des évaluations approfondies de l'interrelation entre la politique monétaire et la stabilité financière soient réalisées deux fois par an (en juin et en décembre), conformément au calendrier de la revue de stabilité financière de la BCE. L'évaluation du mois de décembre 2021 était la première de cette série.
18 Voir Holm-Hadulla et al. (2021).
19 Voir les travaux des groupes de travail sur les interactions entre la politique monétaire et la politique budgétaire (2021), sur l'intermédiation financière non bancaire (2021), sur la productivité (2021), sur la modélisation de l'Eurosystème (2021), sur la numérisation (2021), sur la mondialisation (2021) et sur les anticipations d'inflation (2021).
20 Voir, parmi de nombreuses autres contributions, Bianchi et Mondragon (2021).
21 Voir les travaux du Réseau pour le verdissement du système financier (NGFS), de McKibbin et al. (2021) et du groupe de travail sur le changement climatique (2021).
22 Une description plus détaillée du plan d'action de la BCE est disponible à l'adresse : https://www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2021/html/ecb.pr210708_1~f104919225.en.html.
23 En tout état de cause, il est également essentiel pour la BCE de rester attentive en permanence aux évaluations externes de sa stratégie. Voir, par exemple, Reichlin et al. (2021).

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