Risques financiers : vers une approche neuronale ? avec Christian Schmidt
9 novembre 2016
Depuis quelques années, les neurosciences étudient le fonctionnement du cerveau en lien avec des choix risqués portant sur des enjeux financiers. Les résultats permettent de tirer un certain nombre d’informations utiles pour les opérateurs financiers, sur les marchés comme dans la gestion des investissements :
- Nouvelles catégorisations des risques en fonction des réactions cérébrales : distinction entre incertitudes anticipées et non anticipées (surprise), pouvant conduire à des comportements opposés ; distinction entre risque et ambigüité, le cerveau manifestant une beaucoup plus grande aversion à l’ambigüité, ce qui peut conduire à une prise de risque excessive en situation d’ambigüité. Enfin, la volatilité comme forme de risque dont le traitement par le cerveau se révèle tout à fait différent des autres types de risque .
- Distinction entre l’interprétation cérébrale et statistique des différentes mesures classiques des risques financiers (moyenne, variance, écart–type, ...) conduisant à des réactions souvent différentes. Des études récentes montrent que des modèles tirés de ces travaux, lorsqu’ils sont appliqués à certains marchés, fournissent des résultats supérieurs aux modèles financiers classiques.
- Informations de second degré apparaissant souvent déterminantes dans les décisions financières : biais d’auto-confiance et perception des réactions des autres agents. La connaissance de leurs fondements neuronaux permet aujourd’hui de mieux comprendre leur mécanisme et d’en évaluer ainsi la portée.
L’accélération du processus de décision classique s’appuyant sur un nombre croissant de données, circulant de plus en plus rapidement, et sur une automatisation des opérations via des algorithmes de plus en plus sophistiqués touche aux limites des capacités de réactions cérébrales. Une approche complémentaire de type neuronale permettrait peut-être de relever ce défi …
Christian Schmidt est professeur émérite de l’Université Paris-Dauphine et président de l’Association européenne de Neuroéconomie. Il est l’auteur de « Comprendre nos interactions sociales : Une perspective neuroéconomique », et « Neuroéconomie : Comment les neurosciences transforment l'analyse économique » (éd. Odile Jacob).