La souveraineté de la monnaie et ses transformations historiques : l'invention de la monnaie digitale de banque centrale au xxie siècle et ses conséquences géopolitiques
L'irruption des technologies digitales menace la souveraineté de la monnaie par l'ouverture des systèmes de paiement à des acteurs non bancaires, les Bigtechs. Ceux-ci tirent des rentes énormes de leur accaparement des plateformes du e-commerce, donc de la capture des données des consommateurs. En l'absence de toute régulation, ils exercent une concurrence déloyale vis-à-vis des banques. Le projet Libra de Facebook, prétendant établir une monnaie mondiale sous le contrôle d'un monopole privé a attiré l'attention des autorités monétaires et des régulateurs financiers. Hormis l'établissement d'une réglementation pour rétablir la concurrence dans les services de paiement, l'affirmation de la souveraineté monétaire au sein des nations conduit à l'émergence de la monnaie digitale de banque centrale. Cette innovation apparaît à des rythmes différents selon les pays, en rapport avec la rapidité de la disparition du cash dans les pays les plus avancés, au premier chef la Chine, les dispositions sont prises dans l'organisation des paiements, pour éviter de déstabiliser les banques commerciales. Le problème le plus épineux concerne la transformation du système monétaire international. Car le code digital qui identifie la monnaie numérique de banque centrale permet à celles-ci de conserver le contrôle de l'usage transfrontalier des liquidités qu'elles émettent. Cela remet en cause fondamentalement le principe de la devise clé. Une réforme devra s'ensuivre avec deux possibilités : une mise en comptabilité des codes digitaux pour établir une devise synthétique mondiale ou, plus vraisemblablement, la promotion du DTS digital en tant que liquidité ultime. cela permettrait d'instaurer le multilatéralisme monétaire en faisant du FMI le prêteur international en dernier ressort.