Revue d’économie financière REF 124
Les systèmes financiers d'Amérique latine
Les systèmes financiers d'Amérique latine
Introduction Accès gratuit
Panorama macroéconomique régional
Amérique latine, des années 1950 à aujourd'hui, mutations, essor et nouvelles dépendances Accès gratuit
Après avoir connu un essor important de leur industrie, la plupart des grands pays latino-américains connaissent une désindustrialisation couplée à un retour vers une spécialisation internationale portant sur des matières premières. Leur insertion dans la division internationale du travail depuis une quinzaine d'années se fait à partir d'une reprimarisation de leurs économies (sauf le Mexique et l'Amérique centrale). Celle-ci favorise une désindustrialisation précoce, une léthargie de leur croissance (sauf pour les pays andins). Dit autrement, alors que nombre des économies asiatiques se dirigent vers toujours plus de densité industrielle par habitant, davantage d'industrie dans leur PIB (sauf l'Inde) et une croissance vive, les pays latino-américains restent confinés dans une situation où la densité industrielle augmente peu et le poids de leur industrie dans le PIB régresse. Retour étrange de l'Histoire faite de succès et d'échecs, régression de nature à expliquer la crise que ces pays traversent aujourd'hui ?
Termes de l'échange et dynamique macroéconomique en Amérique latine Accès gratuit
Cet article examine dans quelle mesure les variations des termes de l'échange conduisent à des fluctuations conjoncturelles et affectent la trajectoire du PIB en Amérique latine, et plus particulièrement dans les sept plus grandes économies de la région. Nous montrons que les chocs affectant les termes de l'échange sont un élément explicatif important des fluctuations conjoncturelles et qu'ils les expliquent en moyenne à hauteur de 30 % dans les pays de notre échantillon. Nous mettons également en évidence une relation de long terme entre les termes de l'échange et le PIB qui affecte aussi dans la plupart des pays concernés la dynamique à court terme de la croissance. Les résultats varient selon les pays, ce qui suggère une hétérogénéité de l'exposition aux chocs externes et aux politiques économiques nationales.
L'Amérique latine dans la globalisation financière : a-t-on appris des crises passées ? Accès gratuit
Cet article propose une réflexion des politiques monétaires et de change suivies par les pays d'Amérique latine lors des crises financières, qui sont apparues au cours de chaque décennie, depuis le début des années 1980. Il expose ce qu'a impliqué le syndrome que Reinhart expose par « cette fois-ci, les choses sont différentes ». Sont développées notamment les erreurs de diagnostic sur les causes structurelles des crises, les dommages causés par la volonté de maintenir un taux de change fixe par rapport au dollar au moment fort des crises. L'article se penche également sur les problématiques auxquelles les pays font actuellement face : la malédiction des ressources, le dilemme entre appréciation monétaire et bulles financières, les enjeux du ciblage d'inflation. Nous suggérons que les gouvernements ont appris des crises passées, en ancrant davantage les politiques financières sur la réalité de leurs économies : le régime de change n'est plus l'élément guidant la politique de lutte contre l'inflation, les prêts en monnaie locale ont augmenté grâce à l'essor des marchés obligataires domestiques, la politique monétaire est demeurée accommodante au cours de la crise financière de 2008, des accords de swaps entre banques centrales sont conclus pour répondre aux besoins de devises internationales.
Panorama des régimes de change en Amérique latine : l'attrait croissant pour les régimes de change flexibles Accès gratuit
La plupart des grands pays d'Amérique latine ont maintenant des taux de change flottants. Toutefois les banques centrales se réservent la possibilité d'intervenir soit directement sur le marché, soit par des mesures réglementaires susceptibles d'influencer le taux de change. Cela n'a pas toujours été le cas. Jusque dans les années 1990, dans beaucoup de pays, le taux de change était un des principaux outils d'« ancrage » d'une inflation qui a parfois atteint des rythmes extrêmement élevés. Les résultats de telles stratégies ont été au mieux mitigés, en particulier, elles entraînaient des déficits extérieurs souvent insoutenables. De nombreuses banques centrales, dont l'indépendance était par ailleurs établie ou renforcée, ont donc progressivement mis en place des stratégies de « ciblage d'inflation », dans lesquelles les taux de change n'avaient plus de rôle décisif. Ils sont donc devenus « flottants » (du moins dans les grands pays). Mais les fluctuations résultant de la hausse des prix des matières premières, puis de leur retournement à la baisse contraignent encore les banques centrales à intervenir parfois activement sur le marché de leur devise.
Perspectives nationales
Brésil : faut-il avoir peur de la dette publique ? Accès gratuit
Le Brésil doit assainir sa situation budgétaire. L'adoption d'un objectif budgétaire conservateur mais réaliste constitue un progrès pour le nouveau gouvernement. La proposition d'un plafond pour les dépenses fédérales et le débat autour de la réforme de la sécurité sociale vont dans la bonne direction. La voie vers le rééquilibrage des finances publiques ne sera pas facile puisque des hausses d'impôts seront probablement nécessaires. Le pays devra adopter des mesures impopulaires sans croissance avec un gouvernement qui n'a pas été élu. Alors que les actifs brésiliens enregistrent une impressionnante performance en 2016, le gouvernement de Michel Temer dispose d'une fenêtre étroite pour stabiliser la trajectoire de la dette publique. Nous examinons dans cet article la nouvelle politique budgétaire, les déterminants de la dette publique et les passifs contingents.
Le Mexique à l'heure des réformes structurelles Accès gratuit
En 2013, le Mexique a mis en place un vaste programme de réformes structurelles visant à lever les obstacles qui entravaient la progression de la croissance économique dans des champs aussi variés que l'éducation, les finances publiques, le secteur financier, l'énergie et les télécommunications. Il est ainsi un des rares pays à avoir voté un nombre aussi important de réformes structurelles en si peu de temps et avec un soutien politique large. La réduction des monopoles et organisations oligopolistiques qui généraient des inefficiences, et l'accès favorisé au crédit à un faible coût pour les ménages et entreprises pourraient entraîner une hausse du taux de croissance potentiel de l'économie mexicaine de près d'un point de pourcentage. Si certaines des réformes ont commencé à faire la preuve de leur efficacité, les effets globaux tardent à se manifester. Et cela d'autant plus qu'elles ne se sont pas attelées à l'atténuation de la nature paradoxale d'une économie mexicaine saine, stable, résiliente et très ouverte commercialement, mais faiblement inclusive, informelle et caractérisée par d'importantes inégalités territoriales et de revenus et par une corruption prégnante.
Le financement de l'économie argentine : la période post-crise et les perspectives Accès gratuit
Après quinze ans de fermeture aux marchés internationaux, l'Argentine entre en 2016 dans un nouveau cycle avec la signature d'un accord avec les fonds procéduriers. L'article dresse un bref bilan du financement de l'économie argentine au sens large. Nous présentons les facteurs structurels qui pèsent sur le développement de l'économie argentine depuis de nombreuses années et explicitons comment ils affectent les capacités de financement des agents. Notamment nous examinons comment le sentiment de défiance à l'égard de la monnaie locale s'est traduit par la formation d'un système financier inefficace. Nous présentons les premières réformes mises en œuvre par la nouvelle administration et les perspectives d'évolution.
L'Argentine après le défaut : conditions d'accès aux marchés internationaux de capitaux et choix de politiques économiques « non conventionnelles » Accès gratuit
Le défaut sur la dette souveraine en 2001 a ouvert pour l'Argentine une période de relations financières complexes avec le reste du monde et riche en changements de politique économique. Raisonnant en termes des déterminants d'offre et de demande de financement externe, cet article montre que l'accès du pays aux marchés internationaux de capitaux a été abordable dans certaines périodes, notamment après la restructuration de la dette en 2005. D'ailleurs certains épisodes de diminution des flux de capitaux entrants nets n'ont pas été dus à des restrictions d'offre mais à une volonté ferme de désendettement des autorités argentines, couplée à la levée de barrières réglementaires. Le renforcement à partir de 2011 de certaines politiques « non conventionnelles », comme la monétisation du déficit et le contrôle des changes, découle certainement de cette pénurie de financement en devises. Or d'autres facteurs plus « structurels » le sous-tendent également : une quête continue d'autonomie dans la politique économique via l'autarcie financière et la « peur » séculaire de dévaluer le peso et de le laisser flotter, de crainte qu'il alimente les anticipations d'inflation.
Les économies de l'arc andin face à la faiblesse des cours des matières premières Accès gratuit
Depuis 2012, les économies de « l'arc andin » (Colombie, Équateur, Pérou, Bolivie) semblent connaître un changement de paradigme de leur modèle de croissance. En effet, à la faveur d'une dynamique haussière des cours des matières premières au cours des années 2000, ces économies ont connu un cycle de croissance remarquable et, parallèlement, une primarisation de leur secteur externe. L'orientation à la baisse des prix des produits miniers à partir de 2012, matérialisant le début du ralentissement de l'activité en Chine, puis celle des cours du pétrole depuis 2014 ont détérioré les termes de l'échange de ces économies et pesé sur leur rythme de croissance. Pour autant, la résilience de ces économies à ce choc dépend de leurs caractéristiques intrinsèques.
Le Pérou et la Colombie apparaissent plus résilients, alors que l'activité en Bolivie et en particulier en Équateur se contracte. Ces économies ont recours progressivement à une politique visant à faire évoluer leurs modèles de croissance pour réduire leur dépendance au secteur primaire. Au-delà du caractère volontariste des différentes autorités nationales, le processus de diversification du modèle de croissance reste attaché aux avantages comparatifs de chaque pays et, en second lieu, aux gains potentiels de productivité.
Venezuela : l'insoutenabilité du modèle de croissance, source de tous les risques Accès gratuit
Alors que le Venezuela est confronté à une sévère crise de balance des paiements suite à la chute du prix du pétrole, il apparaît essentiel de comprendre les origines de cette situation. Cet article étudie tout d'abord les distorsions et les déséquilibres économiques majeurs sous-jacents à cette économie, dont l'hyperinflation, pour ensuite évaluer la capacité du pays à faire face au risque de défaut de paiement. Nous construisons pour cela deux scénarios de besoin et capacité de financement, fortement dépendants du prix du pétrole et du soutien de la Chine. Ainsi nous montrons que, en l'absence d'un rebond très important du prix du pétrole, le défaut de paiement apparaît inévitable. Enfin nous analysons la montée des tensions sociales et politiques qui accompagnent ce contexte économique dégradé.
Enjeux structurels et profondeur financière
L'Amérique latine et la Chine : « Je t'aime… moi non plus » Accès gratuit
Nouveau venu en Amérique latine, la Chine est désormais un partenaire aussi important que l'Union européenne pour la région. La boulimie chinoise de matières premières a contribué à l'accélération de la croissance de l'Amérique latine au cours des années 2000 et le ralentissement chinois coïncide avec la crise qui a éclaté dans plusieurs pays du continent. Cet article commence par évaluer l'empreinte économique de la Chine sur l'Amérique latine : forte sur le plan commercial, elle progresse rapidement au niveau des investissements directs et elle est modeste au niveau des crédits à l'exception de l'Équateur et du Venezuela. Une seconde partie analyse l'impact de la Chine sur l'économie brésilienne. Si l'abondance de devises procurée par le commerce avec la Chine a levé la contrainte externe qui pesait sur cette économie, elle n'a pas servi de levier pour transformer l'appareil de production. La demande chinoise a apporté l'aisance mais cette dernière portait en elle le germe de la crise que n'ont pas su, ou voulu, éviter les gouvernements. La conclusion explore les perspectives à court terme et s'interroge sur les conséquences du changement de régime de croissance de la Chine sur la complémentarité des relations entre la Chine et l'Amérique latine.
Les marchés de dette obligataire en devise locale en Amérique latine Accès gratuit
La qualité et la stabilité des politiques économiques en Amérique latine se sont sensiblement améliorées dans les deux dernières décennies et la progression des marchés de dette en monnaie locale a été soutenue. La volatilité des flux de capitaux reste cependant relativement élevée, entraînant celle des taux de change, et l'amélioration des politiques économiques paraît s'essouffler. De fait (de ce fait ?), le développement des marchés obligataires en monnaie locale s'est interrompu en 2012 en Amérique latine, alors qu'il s'est poursuivi en Asie émergente. Les économies émergentes d'Amérique latine sont confrontées aujourd'hui à un choc de termes de l'échange dû à la baisse des prix des matières premières et à la perspective de conditions financières mondiales plus restrictives. Dans ce contexte, des politiques publiques spécifiques et appuyées par la communauté internationale, conformément aux engagements du G7 et du G20, pour favoriser le développement des marchés obligataires en monnaie locale paraissent plus justifiées que jamais.
L'expérience de CNP Assurances au Brésil Accès gratuit
L'implantation de CNP Assurances au Brésil est un succès. Au-delà de la maîtrise des techniques de valorisation des compagnies d'assurances, qui lui a valu d'emporter les enchères en 2001 pour l'acquisition de Caixa Seguradora, de nombreux facteurs ont contribué à cette réussite. Le premier d'entre eux est un partage des mêmes valeurs entre deux partenaires (CNP Assurances et la banque publique CAIXA) animés de l'ambition commune d'un développement durable. Pour arriver en 2015 à dégager un résultat net de 1,9 milliard de réals et à se hisser en quatrième position en termes de parts de marché, la filiale brésilienne a dû, peu après l'acquisition, se restructurer et rénover sa gamme de produits. En quinze ans, elle a su non seulement accroître sa présence au sein du réseau partenaire en capitalisant sur la marque CAIXA, très forte au Brésil, mais aussi conquérir de nouveaux clients hors du réseau de la banque tant par le lancement de nouveaux produits que par des opérations de croissance externe. Aujourd'hui, la clarté de sa gouvernance et la rigueur de son contrôle lui permettent de rester très éloignée des scandales politico-financiers qui secouent le Brésil. Bien que touchée par la récession brésilienne, issue en partie de ces scandales, CNP Assurances, qui reste confiante dans le potentiel de ses activités au Brésil, se lance dans la conquête du marché numérique avec la première plateforme d'assurances brésilienne 100 % digitale.
Fonds de pension au Chili : un système en pleine évolution après un tiers de siècle de vie Accès gratuit
Les fonds de pension constituent un sujet passionnel par excellence et ceci quel que soit le pays. Le Chili n'est pas une exception. Au point de représenter un véritable paradigme, l'expérience chilienne en matière de réforme du mode de financement des retraites a ceci de singulier que ce pays a été pionnier dans ce domaine, en substituant de manière radicale des fonds de pension à cotisations définies individuelles obligatoires à son ancien système en répartition. Construit sur trois sections, cet article met tout d'abord en évidence les vertus d'une épargne longue, en lien avec l'existence de fonds de pension, générant des externalités positives, qui contribuent, entre autres, au financement et à la modernisation de l'économie. Puis il décrit et analyse de façon spécifique le mode de fonctionnement des fonds de pension chiliens ainsi que leurs performances. Enfin il présente et analyse les principaux projets de réformes actuellement en débat, qui ont l'objectif déclaré de corriger les insuffisances constatées dans le système actuel de financement des retraités.
Le système de retraite par répartition argentin survivra-t-il à la réforme de 2016 ? Accès gratuit
Cet article retrace l'évolution du système de retraites par répartition argentin depuis 1993 jusqu'à la veille de la réforme de 2016, qui introduit un « Programme national de réparation historique pour retraités et pensionnés ». Nous montrons que même si la sécurité sociale était à l'équilibre et épaulée par un fonds de garantie (FGS) représentant 13 % du PIB, des litiges opposaient l'État fédéral et des retraités, lésés par une sous-indexation de leurs retraites par rapport à l'inflation entre 2002 et 2006. Cet équilibre des comptes était aussi assuré aux dépens des provinces, qui étaient privées d'une partie de leurs ressources fiscales. Cette réforme propose un dédommagement aux retraités lésés et un retour graduel de ces ressources fiscales aux provinces. Son financement dépend néanmoins d'une contribution supplémentaire du Trésor et du FGS, qui sera probablement liquidé pour financer cette réforme. De plus, comme une nouvelle réforme structurelle est censée intervenir d'ici trois ans, le futur des retraites par répartition en Argentine est aujourd'hui incertain.
L'apport des monnaies sociales à la microfinance : le cas des banques communautaires de développement brésiliennes Accès gratuit
La microfinance a acquis, depuis sa large diffusion au milieu des années 1990, une place importante dans les stratégies de réduction de la pauvreté. La dernière décennie a néanmoins vu la portée de sa principale technique financière, le microcrédit, relativisée voire remise en cause. Celui-ci souffrirait en effet d'un certain nombre de limites et, dans certains cas, pourrait même être dommageable à ceux qui sont censés en bénéficier. Après un état des lieux de la microfinance au Brésil et avoir rappelé les limites de l'outil microcrédit, nous nous intéresserons à une adaptation particulière du modèle microfinancier, celle mise en œuvre par les banques communautaires de développement brésiliennes, dont on en compte aujourd'hui plus d'une centaine sur l'ensemble du territoire. Une des principales innovations de ces organisations de la société civile est de coupler le microcrédit à l'émission d'une monnaie sociale, dont l'usage – en complément du réal brésilien – est circonscrit au territoire local. Nous verrons ce qu'apportent ces monnaies et dans quelle mesure elles viennent répondre à certaines des limites du microcrédit, à travers l'exemple de la Banque Palmas, fondatrice de ce modèle de finance solidaire. Non seulement outils économiques mais surtout constructions sociales, ces monnaies participent à un développement endogène et peuvent être le vecteur d'une coconstruction des politiques de réduction de la pauvreté.