La crise financière de 2008 et sans doute la future à venir sont autant de signes qui font réfléchir à comment assainir le système financier en général, les banques en particulier.
La finance doit être « désencastrée » (Polanyi, 1944) pour être remise au service de l'économie réelle et de la société. Dès lors, les valeurs coopératives ne seraient-elles pas à même de réviser le business model et le rôle des banques ? Dans l'affirmative, il semble important de questionner la responsabilité sociale d'entreprise (RSE) dans les établissements financiers comme permettant de réconcilier la shareholder value de Friedman (1970) et la stakeholder value de Freeman (2010).
En conséquence, nous replaçons le débat dans la théorie néo-institutionnelle avec les trois isomorphismes – coercitif, mimétique et normatif – pour questionner le modèle bancaire au travers de l'institutionnalisation de la RSE dans les banques coopératives. À ce titre, nous nous intéresserons plus particulièrement au cas des banques populaires.
Les valeurs coopératives comme une réponse
à la crise financière
La crise financière fut une crise de modèle quant à l'endettement, mais elle peut également s'analyser telle une crise du modèle du capitalisme hyperfinanciarisé.
La RSE, que l'on peut définir comme « un ensemble de principes de responsabilité sociale, de processus de « réactivité » sociale, et de politiques, de programmes et de résultats observables dans les relations de l'entreprise » (Wood 1991), peut-elle permettre de questionner le modèle capitaliste dominant ? Pour répondre à cette question, nous commençons par contextualiser la RSE dans le cadre de la théorie néo-institutionnelle.
La RSE vue au travers de la théorie néo-institutionnelle
Au fil des crises et des scandales successifs (Enron et autres Parmalat), des contraintes en termes de réglementation et de normes (financières ou sociétales) ont été édictées, créant de facto un environnement institutionnel exigeant pour les entreprises ; celles-ci y répondent alors de façons différentes.
La théorie néo-institutionnaliste permet de catégoriser les façons dont les organisations s'adaptent à l'environnement dicté par les contraintes réglementaires – ou non réglementaires.
DiMaggio et Powell (1983) considèrent en effet la notion d'isomorphisme sous trois formes :
un isomorphisme coercitif émanant, dans le cas qui nous occupe, de « la pression institutionnelle et sociétale généralisée » (Waddock et al., 2002) ;
un isomorphisme mimétique en réponse aux incertitudes stratégiques ;
un isomorphisme normatif construit avec les expériences de groupes sociaux professionnels qui cherchent, au travers de pratiques communes et cohérentes, à élaborer « une base cognitive et une légitimation, » synonyme d'autonomie.
Les deux premières formes sous-entendent une attitude passive face à la pression institutionnelle, la troisième forme est quant à elle davantage proactive dans l'homogénéisation des pratiques.
En conséquence, les entreprises et les banques peuvent désormais s'appuyer sur des règles ou des normes pour aligner stratégie et RSE, et amener progressivement à une RSE normative appuyée par de bonnes pratiques.
Non seulement l'institutionnalisation de la RSE permettra d'amener au « ré-encastrement, » mais aussi c'est la seule manière de rendre pérenne l'appropriation de pratiques responsables ; si la relation des entreprises (et des banques) avec l'ensemble de leurs parties prenantes se réduit à de simples contrats bilatéraux (donc les attentes desdites parties prenantes, a priori toutes légitimes, ne seront pas traitées avec le même degré de priorité), la RSE ne pourra pas être institutionnalisée et ne sera présente qu'en mode déclaratif, dans les rapports annuels, et non au travers de pratiques responsables.
Afin de changer durablement de paradigme, il convient d'amener à une transition normative. C'est ce que Postel et Sobel (2011) nous proposent en inscrivant leur réflexion en matière de RSE normative dans la grille de lecture de Polanyi (1944) qui dénonçait déjà la marchandisation du monde et la prégnance de la finance : « Une analyse polanyienne de la RSE permet de mettre en évidence le fait que les processus de RSE doivent être pensés avec les institutions de régulation existantes et non pas contre elles. » Si l'on transpose cela au secteur bancaire, alors les banques coopératives, dans leurs prérogatives historiques, peuvent mener vers ce changement de paradigme.
Le modèle coopératif
On entend par coopérative « une association autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d'une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement » (Alliance coopérative internationale1). Les valeurs de ces coopératives reposent sur les notions de responsabilités individuelles et mutuelles, mais également sur l'égalité et la solidarité. Leur éthique est assise sur l'honnêteté, la transparence et la responsabilité sociale.
Les principes de ces coopératives s'entendent comme précisé dans le tableau 1 (infra).
Les principes de la Déclaration sur l'identité coopérative internationale semblent naturellement s'inscrire dans le cadre de la RSE.
Si l'on se focalise sur le domaine bancaire, l'European Association of Cooperative Banks (EACB)2 définit une banque coopérative comme un établissement qui assied son activité sur la création de valeur pour ses membres, le tout contextualisé dans une relation de confiance à long terme ; elle ajoute que tout client peut devenir sociétaire pour des sommes restant modiques.
Les caractéristiques du business model de ces banques reposent sur les éléments suivants :
propriété des membres/clients/sociétaires avec implication dans la gouvernance, la stratégie et la gestion des risques ; objectif de création de valeurs pour lesdits membres dans une relation de long terme ;
« une personne, une voix », conformément aux principes de leurs fondateurs Raiffeisen et Schulze-Delitzsch ; une unique structure reposant sur la notion de stakeholders leur apporte efficience et bonne gouvernance ;
bonnes pratiques et structure résiliente grâce à un niveau élevé de capitaux propres et à des revenus stables ;
objectif de financement de l'économie réelle leur permettant de concourir à la stabilité, elle-même reposant sur une proximité des clients – réseau de PME et de ménages à ancrage territorial ;
ouverture vers la responsabilité sociale grâce aux principes de développement personnel, responsabilité et solidarité (dans une phi losophie sociétale de bien commun), et aux principes de finance responsable (ISR, Green Finance, etc.).
Ces principes s'inscrivent dans les deux grands courants de pensée qui ont été développés en parallèle en Allemagne, l'un conduit par l'économiste Friedrich Raiffeisen, l'autre par le juriste Hermann Schulze.
Schulze, aux côtés de Raiffeisen, a été à l'origine du Crédit Populaire d'Allemagne né après la crise de 1847. Il prônait alors un système d'entraide et de responsabilité individuelle ; le premier comptoir fut créé sur la technique de droit d'entrée et de cotisations qui permettait un droit à l'emprunt.
Quelques années plus tard en France, Ludovic de Besse, père capucin, créait à Angers en 1878 la première Banque Populaire (Banque des travailleurs chrétiens) qui inspirera le modèle du Crédit Populaire de France, né en 1882 avec un ancrage territorial très prégnant (Labye et al., 2002).
Au-delà des différences territoriales – le réseau Raiffeisen s'est développé dans les zones rurales et les banques créées par Schulze l'étaient essentiellement dans les zones plus urbaines (Bülbül et al., 2013) –, on note que les seconds promeuvent la rémunération des administrateurs et le versement des dividendes aux sociétaires.
Plus d'un siècle plus tard, si l'on s'appuie sur le lien potentiellement naturel entre identité coopérative et RSE, on peut questionner le niveau de maturité des banques coopératives quant à l'intégration de la RSE dans leur stratégie, à l'instar de ce que notent Richez-Battesti et Boned (2008) lorsqu'ils relèvent les différences entre les groupes restés proches de leur modèle historique (Crédit Mutuel ou Crédit Coopératif) et les groupes soumis aux règles des marchés financiers via leur véhicule coté (Crédit Agricole avec CASA ou BPCE avec Natixis).
Au-delà même de leur statut juridique qui les amène à avoir des sociétaires, les banques coopératives sont inscrites dans leur territoire et sont souvent dédiées à un secteur d'activité donné, mais certaines ont dévié vers un espace plus financiarisé ; elles ont cherché à suivre les autres banques à structure plus capitalistique, au sens de l'isomorphisme mimétique de DiMaggio et Powell (1983), amenant Richez-Battesti et Boned à les classer comme indiqué dans le tableau 2 (infra).
Nonobstant, il nous apparaît opportun de traiter le cas des Banques Populaires pour deux types de raisons : celles évoquées plus haut en termes de valeurs coopératives (proximité, engagement vis-à-vis du tissu industriel local, etc.) et la convergence des deux concepts – RSE et valeurs coopératives.
L'énonciation « performative » au service
de l'institutionnalisation de la RSE
dans les banques coopératives :
le cas des Banques Populaires
Processus d'institutionnalisation et langage « performatif »
Tolbert et al. (1996), s'appuyant sur Berger et Luckmann (1967), définissent le processus d'institutionnalisation comme « un processus fondamental dans la création et la perpétuation de groupes sociaux durables ». En s'appuyant sur l'isomorphisme institutionnel normatif (DiMaggio et Powell, 1983), l'institutionnalisation de la RSE suppose donc la création de groupes sociaux qui adoptent dans la durée les mêmes pratiques responsables.
Le processus tel qu'il est défini par Tolbert et al. (1996) présente les différentes étapes qui vont permettre de créer, puis d'installer dans la durée ces groupes sociaux. Selon les auteurs, la première étape consiste à intégrer des pratiques ou des référentiels externes : elle est appelée « habitualisation ». La deuxième étape consiste à donner du sens, à théoriser l'ensemble de ces éléments : « objectivation ». Enfin, la dernière étape est celle de l'appropriation, lorsque les pratiques sont définitivement « internalisées » et acquises. On parlera de « sédimentation ».
On peut également dire que, lors de l'étape de théorisation, l'institutionnalisation de la RSE passe par la création d'une véritable connaissance RSE. Celle-ci doit fournir un socle sur lequel bâtir lesdits groupes sociaux. Selon Berger et Luckmann (1967), « tout corps de connaissance en vient à être socialement établi en tant que réalité ». On fera également référence à Nonaka (1994) qui considère que le développement de la connaissance (organisationnelle) s'appuie sur « un dialogue continu entre connaissances explicites et connaissances tacites ». Si l'on adapte l'approche développée par l'auteur, pour passer d'une connaissance RSE tacite (subjective, difficile à formuler et à communiquer, la conscience sociétale, par exemple) à une connaissance RSE explicite (objective, formalisée), on pourra s'appuyer sur la réglementation comme grille de codification. C'est ce que Nonaka (1994) appelle « externalisation ». La connaissance RSE ne sera réellement « sédimentée » au sens de Tolbert et al. (1996), que lorsqu'elle redeviendra tacite. C'est ce que Nonaka appelle « internalisation ».
La réglementation apparaît donc comme une véritable opportunité pour structurer une connaissance – ou compétence – RSE. Cela doit permettre de construire une base théorique solide sur laquelle viendront s'appuyer les pratiques adoptées par des groupes sociaux cohérents. On est clairement ici dans le cadre de l'isomorphisme normatif.
La phase entre la théorisation de la RSE et la « sédimentation » des pratiques responsables, entre la codification ou la formalisation de la connaissance RSE et son « internalisation » est essentielle. Le choix des termes (des mots) utilisés dans ce processus est important. Oral ou écrit, on parlera de langage (ou de parole) en faisant référence à Austin (1962) : ce que l'auteur appelle un « acte de langage » (ou « acte de parole », traduction de speech act) doit donner à celui qui transmet la capacité d'agir sur son environnement par ses mots (énoncés.) Il ne s'agit pas d'énoncés qui affirment ou décrivent une situation donnée, mais d'énoncés qui annoncent des actions à venir. On parlera de langage (énonciations) performatif.
Dans son ouvrage de référence, Austin (1962) définit deux types d'énonciations : les énonciations « constatatives » qui sont des affirmations – vraies ou fausses – ou encore des descriptions ; les énonciations « performatives » pour lesquelles l'énonciation est un acte en soi. Dans le cas d'une énonciation performative, il y a accomplissement – avec succès ou non – des actes désignés.
Aussi, quand on parle de « RSE coopérative », cette énonciation sous-entend que l'acte de rapprochement entre le concept de RSE et les valeurs coopératives a été accompli.
Le cas des Banques Populaires
Ce rapprochement a été effectivement accompli dans le groupe des Banques Populaires en 2010. Cela a donné lieu, en 2011, au premier « Bilan Coopératif et RSE »3. Comme l'écrivait à l'époque Raymond Oliger, président de la FNBP (Fédération nationale des banques populaires) : « La question des rapports existants entre la RSE et l'identité coopérative constitue un enjeu d'une grande actualité et d'une grande modernité. Nous nous trouvons en effet dans un contexte où deux conceptions se développent, s'entrecroisent et parfois se concurrencent. » Pendant plus de 150 ans, les valeurs coopératives ont eu à cœur de (re)mettre l'humain au centre de tout, tandis que la RSE, plus récemment, se donnait pour objectif de répondre aux attentes (toutes légitimes) de l'ensemble des parties prenantes d'une organisation ainsi que l'identification (et la mesure) des impacts sociaux et environnementaux des activités de celle-ci.
La convergence des deux peut sembler évidente (nombreux sont ceux, au sein des banques coopératives, qui considèrent que la RSE fait partie de leur ADN), mais la réalité prouve régulièrement que cela ne va pas de soi.
À la suite de nombreuses crises qui ont eu lieu depuis le début des années 2000, la réglementation en termes de RSE – de même que la conscience sociétale en général – s'est considérablement renforcée au point de devenir une partie prenante à part entière (Waddock et al., 2002). Pour de nombreuses organisations, la RSE reste néanmoins encore perçue comme une contrainte qui ne leur propose qu'un seul choix : respecter la loi ou expliquer pourquoi elles ne la respectent pas (comply or explain).
Dans son éditorial du Bilan coopératif et RSE de 2011, Raymond Oliger présente la RSE comme « une opportunité pour le modèle coopératif [qui doit lui permettre de] se renouveler, de réinscrire ses valeurs originelles dans le xxie siècle ». Pour conclure, il fait une proposition iconoclaste : « Peut-être est-il temps de s'approprier l'outil RSE, de s'en saisir en l'adaptant à notre modèle coopératif, lui rendant ainsi la place de choix qui lui revient ? »
S'il est fréquent de constater que les banques coopératives ont parfois du mal à rapprocher la RSE – telle qu'elle est « importée » dans les référentiels externes utilisés pour la publication des rapports annuels – de leur identité coopérative, le choix de qualifier ce rapprochement en utilisant un terme (langage) spécifique, la « responsabilité sociétale des entreprises coopératives » (RSEC), n'est pas anodin.
Pour reprendre la notion de langage performatif, il s'agit là de l'énonciation d'un accomplissement, réalisé ou à venir, qui est (sera) un succès ou non : celui de l'acte de rapprochement de ces deux concepts.
Si l'on se réfère au processus d'institutionnalisation, cette énonciation trouve sa place dans l'étape de théorisation qui, après une période de changement (qui peut être longue et douloureuse), doit déboucher sur une totale appropriation du lien entre les deux.
Pour l'année 2017, les dirigeants de la FNBP (André Joffre et Michel Roux) avancent que l'ensemble des actions « responsables et coopératives » de la banque est « recensé, mesuré et restitué à travers le Bilan Coopératif et RSE »4. C'est ce que la banque appelle le « Dividende coopératif et RSE ». Celui-ci s'organise autour de quatre des sept chapitres de l'ISO 26000 : la gouvernance coopérative ; la relation entre la banque et ses consommateurs (principalement les sociétaires) ; le développement local et l'engagement sociétal ; et l'environnement. En 2017, l'engagement du réseau est valorisé à 35,4 M€ (contre 14,6 M€ en 2011).
La caractéristique fondamentale du « Dividende coopératif et RSE » est qu'il va au-delà des contraintes réglementaires et du simple métier de banquier. C'est ce que la banque appelle le « + coopératif » : il répond à un objectif non commercial et est un « vecteur d'innovation sociétale et d'amélioration continue des pratiques bancaires au service de la société ».
Ainsi donc, on peut dire que l'ensemble de ces énonciations « performatives » (RSEC ; Bilan coopératif et RSE ; « Dividende coopératif et RSE » ; « + coopératif ») contribue à « désencastrer » la finance, au sens de Polanyi (1944), en la remettant au service de la société.
Mais si ces initiatives ont été mises en œuvre par la FNBP, « instance de réflexion, d'expression et de représentation des Banques Populaires et de leurs sociétaires », on peut se demander si elles sont reprises – et mises en œuvre – au niveau des territoires par les différentes Banques Populaires régionales.
Prenons l'exemple de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne (BPALC) et de la Banque Populaire du Sud (BPS).
Dans la partie « Informations sociales, environnementales et sociétales » du rapport annuel de la BPALC pour l'exercice 20175, il est clairement mentionné que la RSEC doit être un « levier sensible de progression de la valeur » pour la banque quand celle-ci reconnaît ses responsabilités et met tout en œuvre pour répondre aux attentes, toujours plus nombreuses, de l'ensemble de ses parties prenantes. L'engagement de la banque est résumé par une énonciation « performative » qui a la particularité d'inclure le mot « agir » : ABCDE (agir en banque coopérative durable et engagée).
Pour la banque régionale, le lien entre sa politique RSE et la réglementation est très clair. Comme c'est écrit dans le rapport annuel 2017, « [le] reporting réglementaire sur la RSE [contribue] à cet effort de la BPALC à intégrer, de façon renforcée et progressive, des critères RSE dans sa gouvernance, dans son activité économique et au sein de ses métiers. La Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne s'est ainsi engagée dans une dynamique démontrée d'évaluation continue de sa politique RSE. »
En cohérence avec la FNBP, la BPALC présente le Dividende Coopératif et RSE comme étant le reflet de son « + coopératif » (il représente 6,1 M€). On peut également considérer que la banque a atteint un vrai niveau de maturité en matière d'intégration de la RSE avec l'évolution de son système de rémunération collective qui, en 2016, a rajouté un bonus RSE aux quatre critères de performance existants.
Le rapport annuel 2017 de la Banque Populaire du Sud6 reprend le même langage « performatif » que la BPALC.
En introduction de sa partie « Informations sociales, environnementales et sociétales, » la banque affirme le lien entre les valeurs coopératives et la RSE avec le sous-titre suivant : « Stratégie RSE bâtie sur notre identité coopérative ». La BPS présente ses missions fondamentales – ancrage territorial, relation à l'économie réelle et aux acteurs économiques et sociaux – en affirmant que « la [RSE] constitue l'expression de cet engagement renouvelé ».
Comme la BPALC, la BPS met en avant son Dividende coopératif et RSE (1,4 M€), reflet de son « + coopératif ». À nouveau, il est précisé qu'il s'agit d'initiatives qui vont au-delà des obligations réglementaires et des missions de base du métier bancaire.
Il est par ailleurs clairement indiqué que la démarche RSE de la BPS s'inscrit dans un cadre beaucoup plus large, celui du Groupe BPCE auquel le réseau des Banques Populaires appartient. Les actions régionales sont cohérentes avec la stratégie RSE du Groupe BPCE telle qu'elle a été formulée en 2015 dans le cadre du plan à long terme 2018-2020 avec les priorités suivantes :
« être le groupe bancaire […] coopératif le plus engagé auprès des clients et des territoires ;
être une banque de référence sur la croissance verte et responsable ;
concrétiser nos engagements coopératifs et RSE dans nos pratiques internes ;
être une banque exemplaire dans ses relations avec ses parties prenantes. »
De facto, on voit que quels que soient les mots (énoncés) utilisés, les rapports annuels des deux Banques Populaires régionales, BPALC et BPS, annoncent la RSEC, le rapprochement – ou la volonté de rapprochement – de la RSE et de l'identité coopérative : « Concrétiser [leurs] engagements coopératifs et RSE dans [leurs] pratiques internes. »
Conclusion
Les banques coopératives peuvent donc aider au changement de paradigme devenu crucial pour remettre la finance à l'endroit. La réglementation renforcée depuis la crise financière et les COP (21 et suite) peut aider à un changement ; pour autant, si ce renforcement est nécessaire il n'est pas suffisant. En effet, ce processus assimilable à une pression institutionnelle s'inscrit dans un isomorphisme coercitif (dans l'esprit de conformité) ou un isomorphisme mimétique (on s'aligne sur les autres). Il faut aller plus loin ; la réponse à une pression externe, quand bien même institutionnelle, doit être plus proactive pour normaliser de façon pérenne des pratiques responsables. On pourra alors parler de RSE normative.
Les banques coopératives, grâce à leurs valeurs d'origine, peuvent servir de modèle pour faire converger la réglementation en termes d'éthiques et de RSE avec les bonnes pratiques – à condition toutefois qu'elles restent fidèles à ces dites valeurs inscrites dans leur construit et leur patrimoine sociétal.