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 Les nouveaux acteurs de la finance


Hubert de VAUPLANE * Avocat au barreau de Paris, Sciences Po (Paris). Contact : hubert.devauplane@sciencespo.fr.
Comme de nombreux autres métiers, la finance se trouve confrontée à l’apparition de nouveaux acteurs, de nouveaux modes de distribution, de nouveaux comportements de la part des clients et de nouveaux business models. Si toutes ses activités sont affectées, ce sont les activités bancaires traditionnelles, celles de prêts, de dépôts et de paiement, qui sont toutefois les plus impactées par ce phénomène en raison de la mise en place des nouvelles régulations et de l’émergence des FinTech. Les banques disposent d’atouts importants pour faire face à ces évolutions, elles devront toutefois repenser en profondeur leurs modèles opérationnels.

La révolution technologique digitale touche à son tour l’ensemble des métiers de la finance. Comme de nombreux autres, les métiers de la finance (que l’on entend ici par les activités bancaires, de gestion et d’assurance) se trouvent confrontés à l’apparition de nouveaux acteurs, de nouveaux modes de distribution, de nouveaux comportements de la part des clients et de nouveaux business models. Si toutes les activités de la finance sont affectées, ce sont les activités bancaires traditionnelles, celles de prêt, de dépôt et de paiement, qui sont toutefois les plus impactées par ce phénomène.

De Lending Club en passant par Quicken Loans, de Kabbage à CommonBond, ce sont des nouveaux noms qui apparaissent dans la façon de prêter et d’emprunter. La combinaison de deux forces explique ce phénomène : le digital et la dérégulation. Le digital en ce que l’utilisation d’Internet et, plus largement, des médias sociaux bouleverse le rapport à autrui et donc aux clients. La dérégulation, parfois aussi appelée « re-régulation », si l’on se place du côté bancaire, en ce que la crise financière, en imposant une réglementation drastique au secteur financier, a libéralisé l’accès à celui-ci à de nouveaux acteurs. Ces nouveaux acteurs, que l’on désigne comme les « FinTech », associent les technologies du digital aux services financiers, qu’elles soient à destination des particuliers (B to C) ou des entreprises (B to B). Cet ensemble regroupe des entreprises ou plus généralement des start-up de toutes tailles, avec des projets aussi différents les uns que les autres, mais qui se rejoignent en ce que tous abordent les métiers de la finance de façon « disruptive », c’est-à-dire en rupture avec les modèles antérieurs d’organisation de ces activités, en privilégiant une approche liée à l’utilisation des technologies et des médias. Si le métier de la banque est de servir d’intermédiaire entre le marché et les épargnants/investisseurs, l’Internet est lui-même une machine à désintermédier les intermédiaires traditionnels.

Comment expliquer ce paradoxe ?

Comme la plupart des autres secteurs d’activité, les activités financières sont traditionnellement organisées de manière verticale : l’entité qui produit (un bien ou un service) est aussi celle qui distribue auprès des clients. Autrement dit, l’entreprise est organisée autour du produit : sa conception, sa production, son marketing, sa vente auprès des clients (B to B ou B to C) : tout tourne autour du produit. On comptabilise le nombre de clients par produit, on s’efforce de vendre plusieurs produits de la même entreprise au même client (le cross selling), on analyse la rentabilité de l’entreprise en fonction de la quantité des produits vendus, du renouvellement de la gamme et de la marge dégagée entre la production et la vente. Ce mode d’organisation de l’entreprise (qui remonte à la révolution industrielle) a profondément évolué avec l’arrivée d’Internet et la démocratisation de son usage. Les nouveaux acteurs du digital (quel que soit le secteur d’activité) sont organisés non de manière verticale, mais horizontale, non en fonction du produit ou du service, mais du client. Ainsi, moins qu’un produit ou un service vendu aux clients, c’est un besoin des clients auquel il est répondu. L’entreprise analyse les évolutions de la société et propose des produits ou des services répondant à cette analyse. La différence fondamentale avec l’organisation précédente tient en ce que dans l’économie digitale, les entreprises sont (rarement) les producteurs, les fabricants des biens ou des services qu’elles proposent. Ceux-ci sont fabriqués soit par des spécialistes, soit par des « proconsommateurs », selon l’expression utilisée par Jeremy Rifkin, c’est-à-dire par des internautes qui sont consommateurs ou producteurs selon le cas. Dans ce nouveau modèle d’organisation de l’entreprise, celle-ci cherche d’abord à répondre aux besoins (de services ou de biens) de la clientèle (Rodet, 2009).

Trois éléments distinguent les procédés de cette nouvelle forme d’économie (Luyckx et Masset, 2014) :

  • une logique horizontale inhérente à l’organisation en réseau, au peer to peer (P2P), avec une décentralisation et une absence de centre unique de décision ; cela conduit à une réduction de la sphère de la production dirigée et hiérarchisée et une extension au maximum de la sphère de l’activité humaine autonome et décentralisée ;
  • la mutualisation des outils et des connaissances avec un accès libre à tous ceux qui contribuent : partage par des individus ou des groupes d’individus de biens, d’équipements et de connaissances de manière à optimiser l’accès à ces ressources et leur rentabilité (par le partage des coûts d’investissement, des frais d’entretien, d’assurance, de réparation, etc.) ;
  • une logique coopérative étendue (crowdsourcing) liée à des communautés d’intérêts ou locales (utilisation de la créativité, de l’intelligence et du savoir-faire d’un grand nombre de personnes pour réaliser certaines tâches).

C’est cette approche que retiennent les sociétés de la FinTech.

Qu’est-ce que la FinTech ? Le Centre national de recherche numérique à Dublin la définit comme l’innovation dans les services financiers ou, plus précisément, les entreprises qui utilisent la technologie pour perturber (to disrupt) les systèmes financiers en place.

Alors que les modèles bancaires et d’assurance restent encore largement organisés verticalement autour des produits, ces nouveaux acteurs profitent de leur souplesse et de leur agilité pour proposer des biens ou des services totalement nouveaux, répondant d’abord aux attentes des clients. Leur but n’est pas de fabriquer des produits, mais de proposer un mode de consommation plus personnalisé en s’appuyant sur l’expérience des clients, leur savoir-faire.

Les individus sont habitués à utiliser des applications numériques dans tous les domaines de leur vie quotidienne dont ils attendent une réponse rapide et efficace, au moindre coût. Il en est de même pour les activités bancaires et financières. Quand quelqu’un se connecte à l’application bancaire de sa banque, il anticipe le même niveau de service qu’il obtient avec Amazon, Spotify ou Facebook. Or tel n’est pas le cas : les banques leur proposent leurs propres services, à des conditions peu transparentes, souvent sous forme d’offres liées ou groupées et selon des fonctionnalités décidées par les équipes de la banque.

C’est ce changement de comportement que captent les FinTech, comme toutes les entreprises disruptives.

Pour autant, tout n’est pas évident pour ces nouveaux acteurs. L’une de leurs difficultés réside dans le fait qu’ils ne disposent pas de relations avec le client final, contrairement aux banques et aux assurances. Il leur faut donc « acquérir » des clients, soit par eux-mêmes (rarement), soit par des tiers (le plus souvent). Ce qui explique pourquoi la plupart du temps ces nouveaux entrants utilisent des réseaux de distribution indépendants (comme les conseillers en gestion de patrimoine – CGP – en matière de gestion d’actifs, les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement – IOBSP – en matière de crédits, ou les intermédiaires d’assurance en matière de produits d’assurance).

Pour l’instant, les entreprises de FinTech ne portent pas encore ombrage aux activités bancaires du fait que la plupart du temps, ces entreprises viennent se « brancher » sur les banques. Mais cette première vague d’entreprises sera suivie par une nouvelle vague encore plus en rupture avec le modèle antérieur. On verra alors se créer des banques FinTech proposant, à partir de zéro, les fonctions suivantes : une application (API – application programming interface) pour se connecter à des tiers, un processus d’identification de la clientèle (KYC – know your client), une licence bancaire de base, pour être indépendant des banques traditionnelles et détenir la capacité de recevoir des fonds du public sans restrictions et une clientèle propre. Les produits par la banque FinTech seront limités à quelques activités de base : des comptes bancaires (multidevises), des cartes de crédit et de débit (multidevises), et un eWallet (multidevises). Tous les autres services (investissements, commerciaux et courtage, gestion de patrimoine, prêts, crédits et prêts hypothécaires, assurances et paiements) seront fournis par des tiers via une API, y compris les banques de la vieille école, les autres institutions financières et les sociétés de FinTech.

Pourquoi les activités bancaires sont-elles plus touchées que les autres activités de la finance ?

La réponse est double. La première partie de la réponse constitue d’ailleurs un paradoxe : la régulation imposée aux banques postcrise a facilité l’émergence de ces nouveaux acteurs. Les nouvelles règles d’exigences de fonds propres de Bâle III, mais surtout les législations nationales comme les règles Volcker (États-Unis), Vickers (Royaume-Uni), Liikanen (Unions européenne) ou autres (France), qui imposent une stricte séparation entre activités dites « spéculatives » et activités dites « commerciales » des banques, voire même qui interdisent l’exercice de certaines activités aux banques, ont permis à ces nouveaux acteurs d’émerger pendant que les banques étaient concentrées sur la mise en œuvre de ces nouveaux ratios de fonds propres. Au-delà de ces contraintes prudentielles, les nouveaux acteurs essayent la plupart du temps de trouver la solution idéale à l’équation réglementaire qui permet de se lancer dans ces activités financières au moindre coût réglementaire. Si ces entreprises ne cherchent pas à tout prix à échapper à la réglementation et à s’insérer dans les interstices de celle-ci, il est clair que l’accès à un agrément bancaire reste encore perçu comme un obstacle à éviter a priori, du fait bien sûr du coût lié à l’obtention et au maintien de cet agrément, mais surtout du poids du reporting vis-à-vis du régulateur bancaire. C’est ce qui explique qu’un nombre important de ces entreprises se développe en passant des accords avec des établissements régulés pour l’utilisation de leur licence bancaire. En attendant de devenir suffisamment importante pour se lancer dans un agrément bancaire.

La seconde raison qui explique pourquoi les activités bancaires sont plus touchées que d’autres activités financières est d’ordre plus complexe puisqu’elle touche à un mode de consommation nouveau par le recours au digital et la facilité avec laquelle il est désormais possible d’acheter des produits bancaires comme des prêts ou des dépôts via Internet. Ainsi, en se penchant sur l’évolution du digital dans les activités bancaires, on a vu évoluer l’offre numérique, passant d’un simple canal de distribution de produits bancaires classiques à une offre spécifique. Il n’en reste pas moins que les banques doivent faire face à ce défi de la digitalisation du fait du changement de comportement commercial de leurs clients (British Banker Association, 2015). Ce changement de comportement de consommation tient en partie au sentiment de méfiance vis-à-vis des banques qui perdure à la suite de la crise de 2007. Mais plus fondamentalement, les activités bancaires traditionnelles restaient largement, jusqu’à la crise, entre les mains des acteurs bancaires, la concurrence ne s’exerçant qu’entre des acteurs issus du même milieu, au point d’ailleurs que les grands acteurs nationaux restaient souvent en situation largement dominante dans leur propre pays. Ainsi, si l’on prend l’exemple des États-Unis, le marché des prêts aux PME/ETI (entreprises de taille intermédiaire) reste entre les mains des banques à plus de 95 %. Même chose pour celui des prêts personnels non garantis (81 %), voire celui des prêts hypothécaires (73 %) (Nash et Beardsley, 2015). Dans ces conditions, l’entrée de nouveaux acteurs doit emprunter des voies différentes de celles utilisées jusqu’à présent pour briser cette domination.

Les multiples régulations imposées aux banques couplées à l’utilisation d’Internet comme vecteur d’origination et de distribution ouvrent la voie à une féroce concurrence, avec des nouveaux acteurs non pénalisés par ces contraintes réglementaires et surtout disposant de structures plus souples avec des charges beaucoup moins élevées que les banques traditionnelles. Le coût de maintien d’un réseau d’agences bancaires (entre les charges de personnel et l’immobilier) constitue, avec les dépenses informatiques, le poste de charges le plus élevé pour une banque, alors que l’utilisation de ce réseau par la clientèle est de moins en moins fréquente. Plus généralement, la base de coût des banques comprend 50 % de coûts de personnel au sens large, l’immobilier représentant en moyenne 12 % du coefficient d’exploitation. Réduire ce coût de –12 % à –15 % devient une nécessité, afin de tenir les objectifs d’optimisation du coefficient d’exploitation (en Europe, en moyenne de 69 % à 55 %, soit –10 % entre 2012 et 2016 d’après Roland Berger Strategy Consultants).

Quels impacts sur l’organisation des banques ?

Le mode de distribution via des agences bancaires va considérablement être affecté au cours des prochaines années par ce double bouleversement technologique et disruptif (Accenture, 2015). L’agence bancaire traditionnelle a sans doute vécu trop longtemps dans son organisation actuelle et les banques vont devoir modifier leurs relations clients, tout en supprimant de nombreuses agences.

En 2012, le cabinet John Lang LaSalle (JLL) a réalisé une étude prospective, Global Retail Banking, portant sur l’évolution des réseaux bancaires à l’horizon de 2020. Selon elle, les clients bancaires sont plus attentifs à leurs finances personnelles et deviennent très exigeants vis-à-vis de leur banque, qu’ils conçoivent de moins en moins comme un « one stop shop » et de plus en plus comme un fournisseur parmi d’autres, au sein d’un portefeuille de partenaires financiers : « La relation bancaire, historiquement complexe, comporte désormais moins d’affectio societatis et plus d’attentes rationnelles : de la facilité dans les usages, de la transparence, de l’équité, de l’éthique tangible. »

En Grande-Bretagne, le nombre de réseaux nationaux est passé de treize en 2008 à huit en 2012, six banques concentrant 90 % des agences physiques. Dans une étude récente, le cabinet Roland Berger Strategy Consultants anticipe de 15 000 à 20 000 fermetures d’agences en Europe (soit –6 à –8 % par rapport à une base de 240 000 unités physiques en Europe de l’Ouest). Assez curieusement, jusqu’en 2013, certains géants bancaires américains comme Chase Manhattan maintenaient un rythme annuel de 500 ouvertures d’agences afin de renforcer leur maillage. D’un autre côté, on voit apparaître de nouveaux acteurs s’appuyant sur des réseaux physiques : Metro Bank, NBNK, Virgin Money ou Tesco.

Les réseaux bancaires en 2020 feront ainsi la part belle aux meilleurs clients qui se verront réserver des agences dédiées, au sein desquelles des espaces de services et de conseils leur seront accessibles (approche des cafés ING Direct ou de Barclay’s en France), plus proches des lounges de compagnies aériennes que des bureaux de conseillers protégés du sas d’entrée par un vaste comptoir. La masse des clients sera, quant à elle, renvoyée sur des plates-formes téléphoniques, les agences s’apparentant alors pour ces consommateurs de masse à de simples espaces d’accueil dotés de capacités de visioconférence et de téléprésence (concept de type « hub & spoke »).

Quelles conséquences pour les banques ?

Avec la digitalisation, les banques doivent faire face à toute une série de menaces : en matière de paiement, l’apparition de moyens de paiement alternatifs qui concurrencent directement les cartes de paiement traditionnelles et les revenus afférents, et la perte du contact client si elles se laissent « intermédier » par de nouvelles solutions qui intègrent leurs moyens de paiement dans des solutions plus vastes. En matière de crédits, le développement des plates-formes de P2P lending tant vis-à-vis des particuliers que des entreprises. Mais les banques doivent aussi faire face à des défis sur leur cœur de métier, à savoir les dépôts bancaires, de nombreuses structures offrant ici ou là des possibilités de déposer son argent avec des contraintes réglementaires minimales.

Ainsi, le site internet chinois Alibaba a capté une part importante des dépôts bancaires des clients particuliers en offrant un service entrant directement en compétition avec les produits bancaires similaires.

Dans une étude récente, Goldman Sachs estime que sur le seul marché américain, ce sont près de 11 Md$ de revenus des banques traditionnelles qui sont impactés par ces nouveaux acteurs (Nash et Beardsley, 2015). L’industrie bancaire traditionnelle va devoir faire face à des défis concurrentiels auxquels elle était peu habituée jusqu’à présent. Ces pertes de chiffres d’affaires, mais aussi la baisse de marge induite par ces nouveaux acteurs aux coûts plus faibles vont obliger les banques à opérer des choix stratégiques drastiques sur quasiment l’ensemble de leurs activités. Ainsi, il est probable que le modèle de la banque universelle, si cher à l’Europe, ne sorte pas indemne de cette évolution en ce qu’il constitue l’archétype du modèle d’organisation verticale autour du produit. De la même manière, la recherche de proximité avec le client va conduire les banques à effectuer des choix dans leurs réseaux et à ne garder que ceux qui sont fortement ancrés dans la culture et les mentalités locales. Enfin, le besoin de simplicité va porter un coup aux établissements qui avaient misé sur la complexité des offres (liées, groupées, indissociables, etc.), celles-ci permettant de structurer des marges confortables, et ce, d’autant plus qu’elles n’étaient pas la plupart du temps transparentes. Car il s’agit là d’une autre caractéristique de la banque de demain : Internet permet une transparence totale des opérations. Ainsi, chez la plupart des plates-formes de P2P lending, les prêteurs ont accès à l’ensemble de la base de données des prêts effectués, permettant d’analyser par eux-mêmes leurs opérations. De la même manière, chez les start-up en matière de gestion, les commissions et les frais sont totalement transparents vis-à-vis des clients.

Les banques gardent une force que personne ne peut leur contester : leur bilan et l’utilisation qu’elles peuvent en faire vis-à-vis de leurs clients. À condition toutefois de ne pas voir dans ce bilan un simple outil d’optimisation des commissions (selon le modèle originate to distribute), mais une véritable opportunité pour lier une relation durable avec leurs clients.

Ce changement de paradigme n’est pas sans conséquence non plus sur le métier de juriste et la profession d’avocat. De la même manière que les entreprises elles-mêmes, les métiers du droit sont aujourd’hui organisés par silos, avec des experts produits, perdant de plus en plus le sens d’une vision globale et holistique du risque juridique pour une entreprise. Hors de son champ d’expertise, l’avocat et le juriste d’entreprise peinent à formuler un conseil pertinent, même en restant dans un secteur aussi technique que celui de la banque et de la finance. On est spécialiste de produits dérivés, de monétique, de financement export ou d’acquisition, sans disposer d’une analyse dans un secteur autre que celui de son analyse. L’arrivée de nouveaux modèles d’organisation avec le digital ne peut que bouleverser cette vision taylorienne du métier d’avocat.

Alors, assiste-t-on à la fin programmée des banques ? À leur disparition lente ?

Certes non. Et ceux qui chantent la mort des banques sont des utopistes : le métier de banquier dans ces diverses composantes de financement et de dépôt perdurera aussi longtemps que les hommes utilisent la monnaie pour échanger entre eux des biens et des services. Mais attention toutefois à ne pas s’enfermer dans une vision idyllique où le modèle bancaire tel qu’il est aujourd’hui perdurerait dans son organisation et à ne pas considérer que l’avenir bancaire ne peut être que la croissance organique ou externe par fusions entre banques, voire aux mégas opérations de rapprochement transfrontières entre établissements financiers. Une telle vision ne tient pas compte des immenses changements qui se produisent en ce moment en dehors de ces établissements. La banque n’est pas la sidérurgie de demain, mais clairement elle constitue un champ d’opportunités pour tout un ensemble d’acteurs non bancaires : start-up de la FinTech, mais aussi mastodontes de la distribution qui souhaitent capter les flux de paiements de leurs clients et leur proposer des services bancaires de base, sans même parler des entreprises qui cherchent à diversifier leur source de financement. Tout cela conduit à repenser en profondeur le modèle bancaire, son organisation et son fonctionnement1 pour que les banques puissent s’adapter à ces nouveaux défis technologiques et de consommation, le risque étant qu’elles soient reléguées comme de vulgaires services bancaires de base sans valeur ajoutée.


Notes

1 Notamment pour permettre l’éclosion de nouveaux talents dans une organisation plus stimulante pour la créativité.

Bibliographies

Accenture (2015), The Future of FinTech and Banking: Digilitally Disrupted or Reimagined?, mars.
British Banker Association (en collaboration avec le cabinet Accenture) (2015), Digital Disruption: UK Banking Report, mars.
JLL (Jones Lang LaSalle) (2012), Global Retail Banking: Key Trends and Implications for Retail Banking Real Estate, www.joneslanglasalle.com/ResearchLevel1/JLL_Global_Retail_%20Banking_low_res_ 5_July.pdf.
Luyckx É. et Masset D. (2014), L’économie collaborative, une alternative au modèle de la compétition,Etopia (Centre d’animation et de recherche en écologie politique), mars, www.etopia.be/IMG/pdf/ 20140214_ERL-DEM_econ_coll-web.pdf.
Nash R. M. et Beardsley E. (2015), « The Future of Finance, the Rise of New Shadow Bank », Goldman Sachs Investment Research, 3 mars, www.betandbetter.com/photos_forum/1425585417.pdf.
Rodet J. (2009), « Verticalité, horizontalité et changement dans les organisations. Pensée disjonctive, pensée conjonctive et pensée complexe », février, https://jacques.rodet.free.fr/vhchgt.pdf.