Anticipation du risque de dépendance et patrimoine
Les gains importants d'espérance de vie aux âges élevés enregistrés au cours des décennies écoulées, conjugués avec l'arrivée au grand âge des générations du baby-boom, laissent anticiper une croissance rapide des coûts de prise en charge de la dépendance. Cette perspective alimente les débats sur le mode de financement souhaitable de la perte d'autonomie : en l'absence d'une couverture assurantielle suffisamment large et compte tenu de la difficulté à évaluer tant la probabilité de devenir un jour dépendant que les coûts associés, le risque est grand que les ménages anticipent mal leur effort d'épargne. Cet article s'inscrit dans cette problématique : en mobilisant les données de la vague 2020 de l'enquête Pat€r, nous cherchons à évaluer dans quelle mesure les ménages modulent effectivement leur effort d'épargne en fonction de leur estimation de la probabilité de perdre un jour leur autonomie de santé. À cet effet, nous estimons le patrimoine du ménage en fonction de l'auto-évaluation du risque de devenir un jour dépendant (toutes choses égales par ailleurs, notamment l'état déclaré de santé). De plus, une méthode de variable instrumentale permet de tenir compte de la possible endogénéité du risque anticipé de dépendance (on accumule moins si l'on est en mauvaise santé). Nos résultats montrent bien que plus on anticipe un risque de dépendance élevé, plus on accumule du patrimoine : calculé au risque de dépendance moyen, un écart type de probabilité en plus induit un patrimoine global supérieur de trois mois à huit mois de revenu permanent.