Revue d’économie financière REF 148
Après le Brexit
Après le Brexit
Introduction Accès gratuit
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Le Brexit : liberté ou tragédie ?
Le vote en faveur du Brexit lors du référendum de juin 2016 a libéré de nouvelles forces politiques et économiques puissantes au Royaume-Uni (RU) et dans l'Union européenne (UE). Pourquoi et comment cela s'est-il produit ?
On n'a jamais dit la vérité sur l'UE au peuple britannique – ni sa raison d'être en tant qu'organisation politique internationale chargée de construire une paix durable sur le continent européen, ni les avantages d'une étroite coopération européenne dans un monde interconnecté et multipolaire fondé sur des traités juridiquement contraignants.
L'euroscepticisme au RU, construit pendant quarante ans, n'a pas été contesté par des générations de responsables politiques et a été, sans relâche, alimenté par une presse britannique hostile et agressive.
Il n'y a aucune preuve à ce stade que le RU ait prospéré hors de l'UE ; au contraire, politiquement et économiquement, il a régressé. Il est devenu moins fiable, économiquement instable et moins influent au niveau international.
L'intégration européenne, cependant, a progressé de manière significative depuis que le RU a quitté l'UE, mais l'UE a aussi perdu certains importants atouts et qualités britanniques.
Le Brexit : liberté ou tragédie ? Une tragédie coûteuse pour le peuple britannique qui durera des générations.
Brexit état des lieux : presque deux ans après la rupture, où en est-on ?
Six ans après le Brexit : les relations entre l'Union européenne et le Royaume-Uni en matière de politique de concurrence et de réglementation des services financiers
Bien que l'accord de commerce et de coopération UE-Royaume-Uni et l'accord de retrait, y compris le protocole sur l'Irlande/l'Irlande du Nord, aient établi une base solide pour les relations futures entre l'UE et le Royaume-Uni, ils ne correspondent en aucun cas au niveau d'intégration économique qui existait alors que le Royaume-Uni était membre de l'UE. Il s'agit d'une conséquence naturelle du Brexit et du choix du Royaume-Uni de quitter l'UE où il était pleinement intégré au marché unique. Cette décision a eu un impact sur tous les secteurs de l'économie, y compris sur la politique de la concurrence et des services financiers, créant des frictions et des obstacles au commerce qui n'existaient pas lorsque le Royaume-Uni était membre de l'UE. Néanmoins l'objectif de l'UE est d'avoir une relation stable et positive avec le Royaume-Uni sur la base des accords que les deux juridictions ont signés et ratifiés.
Le Brexit et le secteur bancaire de l'UE : des libertés fondamentales du marché intérieur au statut de pays tiers
Le référendum sur le Brexit a profondément modifié la relation entre le Royaume-Uni et l'Union européenne (UE), dans le secteur bancaire notamment. Le Royaume-Uni étant devenu un pays tiers par rapport à l'UE et au marché unique européen, la relocalisation ordonnée des activités bancaires dans l'UE a soulevé plusieurs défis prudentiels importants. En effet, les clients européens ne pouvaient plus bénéficier d'un service direct depuis le Royaume-Uni. Le présent article explique comment l'UE et la Banque centrale européenne (BCE) en particulier supervisent ce processus de relocalisation, et présente l'approche prudentielle adoptée par la BCE pour résoudre un certain nombre de problèmes épineux posés par le Brexit. La BCE s'est montrée ferme dans ses principes, surtout en ce qui concerne sa politique de « zéro coquille vide », qui exige des banques qu'elles transfèrent dans l'UE leurs moyens stratégiques et de gestion des risques en fonction de leur niveau de risque. Elle a toutefois fait preuve de souplesse et de proportionnalité dans l'application de ces principes, et a affirmé sa volonté d'établir une coopération étroite et transparente avec les autorités britanniques. Il est en effet indispensable de travailler ensemble compte tenu du volume important d'activités bancaires transfrontières qui se poursuivront sur nos marchés dans un avenir proche.
Réflexions sur la réglementation financière de l'UE post-Brexit
Cet article propose un aperçu des efforts accomplis dans la sphère réglementaire et de supervision pendant la première phase post-Brexit et présente les défis à venir. Le Brexit a créé un nouvel environnement pour les institutions financières en Europe. Les banques, les régulateurs et les superviseurs ont travaillé sans relâche pour assurer une transition la plus équilibrée possible. Le Brexit a entraîné des changements structurels pour les établissements de crédit qui ont dû adapter leurs opérations en direction du marché de l'Union européenne (UE). Le Brexit a aussi mis à jour les dépendances de l'UE vis-à-vis du secteur financier britannique, notamment en matière de clearing de dérivés, qu'il faudra bien résoudre dans le futur. Pour l'avenir, l'UE et le Royaume Uni devront continuer à s'engager pour la préservation des marchés financiers ouverts et l'application des standards réglementaires internationaux dans le secteur financier. Ces principes devraient contribuer à construire un cadre de coopération capable d'éviter la fragilisation des standards financiers, le risque de fragmentation ou les dysfonctionnements des marchés financiers.
Paris et les autres places financières européennes après le Brexit
Provoquée par la sortie du Royaume uni du marché unique européen, la relocalisation d'activités financières vers l'Union européenne est significative. Elle concerne tous les métiers : banque, marchés, assurance, gestion d'actifs. La transition n'est toutefois pas achevée, parce que les régulateurs européens ont laissé des délais et accepté une relocalisation par étapes.
Une estimation faite au printemps 2021 relevait 440 firmes concernées, 900 milliards de livres de bilans bancaires et 7 400 emplois. La réalité aujourd'hui est certainement sensiblement supérieure. Plusieurs places financières de l'Union européenne en ont bénéficié, mais Paris apparaît comme la seule ayant reçu des activités de toutes les branches de l'industrie financière et comme la place où se concentrent les activités de marché.
Paris présente plusieurs atouts : son pool de talents, l'attractivité de la ville, la réputation de ses régulateurs, le dynamisme de ses acteurs. Il reste toutefois des handicaps qui se corrigent très lentement, essentiellement du côté des coûts fiscaux et sociaux (charges sociales, impôts de production), ce qui justifie une poursuite des efforts de compétitivité.
Les aspects économiques et financiers du post-Brexit : compétition et complémentarité
Il est difficile de distinguer les impacts économiques du Brexit de ceux de la pandémie. Néanmoins le PIB du Royaume-Uni (RU) se serait détérioré de 5,2 %. Les importations de l'Union européenne (UE) ont sensiblement baissé et le RU est devenu moins ouvert et moins compétitif à l'international. Il y a eu une forte inflation à la suite de la dépréciation de la livre en 2016 et une contraction des investissements liée à l'incertitude. Les effets du Brexit sont limités pour l'UE, économie beaucoup plus grande que le Royaume-Uni.
Dans le secteur financier, le RU s'est retrouvé dans la situation d'un État tiers à l'Union sans passeport européen, soumis aux régimes d'équivalence réglementaire sectoriels. Les mouvements d'équipes de la City vers l'Union ont été assez limités (4 %). Londres garde des atouts, notamment ses infrastructures de marché comme les chambres de compensation, dont la substitution par des structures continentales est complexe. La concurrence réglementaire s'est peu matérialisée, mais pourrait s'intensifier par des adaptations rendant les réglementations britanniques plus efficientes sans affaiblir le cadre.
Que faire ?
L'affaire inachevée du Brexit : les implications pour les entreprises
Les entreprises se sont largement adaptées à la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne et préféreraient regarder vers l'avenir, mais le Brexit lui-même reste une affaire inachevée. Certaines des conséquences les plus perturbatrices de ce divorce historique ont déjà eu lieu : beaucoup d'entre elles ont été moins désastreuses à court terme que prévu, bien que la City de Londres ait perdu son rôle essentiel en tant que capitale de la finance européenne. À plus long terme, des questions clés restent sans réponse sur l'économie britannique et sa compétitivité et sur les relations futures entre le Royaume-Uni et ses anciens partenaires européens.
Au lendemain du Brexit
Les effets du Brexit sur les marchés financiers sont encore incertains. Les transferts d'emploi vers l'UE sont progressifs, avec des effets très marqués à Paris, Dublin, Amsterdam et Francfort, même si Londres demeure encore la place financière la plus dense en Europe. Mais la sortie de la City du cadre réglementaire de l'UE a changé profondément les perspectives d'évolution de l'environnement concurrentiel. Les choses ont déjà changé en matière d'introductions en bourse. Pour amplifier cette dynamique, il faut désormais inscrire l'Union des marchés de capitaux dans une ambition politique d'autonomie stratégique, c'est-à-dire orienter nos projets vers la construction d'un modèle véritablement européen avec des centres financiers distribués mais intégrés et fortement interconnectés. Face au risque d'empilement de mesures technocratiques secondaires qui affaiblissent les acteurs financiers de l'UE, trois priorités doivent désormais prévaloir à la Commission, au Conseil et au Parlement européen : simplification, compétitivité et autonomie stratégique.
Quelle recomposition des services financiers dans l'UE27 après le Brexit ?
Le Brexit a non seulement constitué un bouleversement politique majeur, mais est également à l'origine de transformations profondes pour les services financiers, compte tenu tant de l'importance de ces services dans le bon fonctionnement des économies européennes et britanniques que de leurs liens. Par ailleurs, pour l'Union européenne, le Brexit constitue assurément une opportunité sans précédent d'asseoir son autonomie en matière de financement, de renforcer sa robustesse en développant un système financier polycentrique appuyé sur des infrastructures de marché européennes et de s'inscrire comme leader en matière d'innovation. Cela n'implique pas cependant de relâcher les liens et le dialogue avec le Royaume-Uni : le maintien d'une forte coordination avec les autorités britanniques, particulièrement sur les champs de la réglementation afférents à des risques systémiques ou globaux, demeure éminemment souhaitable pour éviter d'alimenter un risque de fragmentation réglementaire qui serait dommageable.
L'après-Brexit reste à écrire
Le Royaume Uni a recherché de façon constante à bénéficier du « meilleur des deux mondes » dans le secteur financier : l'accès au marché unique et la liberté d'adapter ses réglementations et sa supervision. La renégociation qui a précédé le référendum y parvenait en restant dans l'Union ; dans le cadre du Brexit, l'ambition du Royaume Uni était d'y parvenir en étant hors de l'Union via des accords de reconnaissance mutuelle. L'Union, a refusé de s'engager dans cette voie qui aurait accru sa dépendance en matière financière vis-à-vis de centres de décisions situés dans des pays tiers. On est dès lors dans une situation de concurrence frontale dans laquelle le Royaume Uni s'engage résolument dans une politique de révision du cadre de régulation de son secteur financier pour en accroître, en partie au détriment de l'Union, la compétitivité et l'attractivité via un allégement des contraintes et une flexibilité des réponses réglementaires. De son côté, les marchés financiers de l'Union restent fragmentés et elle peine à améliorer son cadre réglementaire. Le Royaume Uni considère qu'avoir une industrie financière puissante est essentiel, l'Union n'en a jamais fait une priorité. L'après-Brexit reste à écrire, mais il constituera un défi, appelant une prise de conscience de l'urgence de réformes profondes dans l'Union avec la réalisation effective d'une union des marchés de capitaux avec une supervision unique.
Les liens entre les marchés financiers de l'UE et du Royaume-Uni ont-ils résisté au Brexit ?
Six ans après le référendum du Royaume-Uni, la question du Brexit n'a pas encore été résolue. Alors que l'attention se concentre principalement sur le désaccord sur les règles du commerce via l'Irlande du Nord, la résilience des flux financiers transfrontaliers entre l'Union européenne (UE) et le Royaume-Uni ne suggère aucune fracture significative dans les liens qui lient de longue date les marchés financiers de l'UE et du Royaume-Uni. Les deux parties ont été pragmatiques, permettant une transition plus douce, en se prémunissant contre les risques bien connus pour la stabilité financière d'une séparation brutale. L'initiative de l'Union des marchés des capitaux, bien que bien avancée, est loin d'offrir aux entités de l'UE un marché commun des capitaux intra-UE, ainsi que la liquidité du marché et les avantages des réseaux offerts actuellement par Londres. La réalisation de cette Union des marchés des capitaux égalisera les coûts de financement pour les entreprises et les ménages, mais requerra l'élimination des barrières aux flux transfrontaliers de capitaux financiers et bancaires dans l'UE. La préservation des liens entre le Royaume-Uni et l'UE profitera donc aux deux parties, créant un pont en direction de la longue transition vers des marchés de capitaux plus intégrés au sein de l'UE.
Le Brexit : c'est maintenant ?
Plus de six ans après le référendum qui avait vu les partisans de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne l'emporter, le Brexit n'est pas achevé. Cet article rappelle les principaux points de l'accord de commerce et de coopération signé le 30 décembre 2020. L'article présente ensuite un état des lieux de l'application de cet accord et ses conséquences sur l'économique britannique à la mi-2022, sur fond de deux crises d'une ampleur exceptionnelle : la pandémie de Covid-19 au début de 2020, puis l'invasion de l'Ukraine par la Russie à partir de février 2022. Enfin, l'article aborde la question des relations futures entre l'UE et le Royaume-Uni. Liz Truss, Premier ministre, souhaite supprimer les réglementations héritées de l'UE pour renforcer l'attractivité du Royaume-Uni, mais elle semble aussi disposée à rechercher un compromis avec l'UE sur le protocole d'Irlande du Nord et à prendre part à la Communauté politique européenne.
Les opportunités du Brexit ?
Ce que signifie le Brexit reste opaque et contesté. Dans l'immédiat, les relations entre le Royaume-Uni et l'UE dépendent de la résolution du différend sur le protocole d'Irlande du Nord, un pilier essentiel de l'accord de retrait de 2020. Sans accord mutuel, une confrontation majeure se profile. Les conséquences économiques du Brexit ont jusqu'à présent été négatives. Ses fervents défenseurs et l'électorat de plus en plus sont, pour des raisons opposées, déçus. Liz Truss, l'ancien Premier ministre britannique, visait une « nouvelle ère » de croissance économique, stimulée par un programme de droite de réductions d'impôts et de déréglementation, où « profiter des opportunités du Brexit » jouera, sans précision, un grand rôle. La façon dont cela fonctionnera dans la pratique est problématique. Une divergence rapide avec les règles de l'UE pourrait entraîner de nouvelles tensions en termes de « concurrence déloyale ». Pendant ce temps, le parti travailliste d'opposition a rejeté la réintégration dans l'UE, son marché unique ou son union douanière : pour de bonnes raisons électorales, Sir Keir Starmer est fermement opposé à la réouverture du débat sur le Brexit. Cependant, sa politique de « faire fonctionner le Brexit », bien que délibérément vague, laisse entrevoir la promesse d'une relation européenne plus coopérative.
Pour une nouvelle coopération après le Brexit
Le Brexit s'accompagne d'une perte de substance pour l'UE, notamment dans les domaines à haute valeur ajoutée de la recherche et de la finance. Dans cet entretien, Philippe Aghion propose de compenser ces pertes en développant des marchés de coopération entre le continent et le Royaume-Uni dans l'industrie, la recherche, les transports, la défense. Il suggère que les contraintes liées au Brexit imposent à l'Europe de développer des initiatives ambitieuses de coopération, et notamment dans le domaine de la recherche.
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La Théorie monétaire moderne : idées fausses, vraies limites et angles morts. Un tour d'horizon des critiques
Depuis la grande crise financière, la Théorie moderne de la monnaie (TMM) suscite l'intérêt des milieux politique, médiatique et académique. Le « moment » keynésien qui a suivi cette crise a sorti d'une relative confidentialité ce courant de pensée qui défend un retour permanent de la dominance budgétaire à rebours du consensus autour d'une politique monétaire indépendante du pouvoir politique. Toutefois, la TMM fait l'objet de vives attaques de la part d'économistes dits de l'offre, de la synthèse voire même post-keynésiens dont la TMM est pourtant réputée proche. Les points de vue les plus virulents contestent le caractère scientifique de la TMM et la réduisent à un mouvement politique assimilable à l'aile radicale du parti démocrate américain. D'autres critiques plus élaborées s'attellent à démontrer les limites théoriques et empiriques des préconisations de la TMM. Cet article propose une synthèse des critiques adressées à la TMM et apporte une contribution en questionnant l'économie politique de la théorie.